Mathieu Pacaud : la cuisine élégante et chic

Paris (75) 2018, grande année pour Mathieu Pacaud, homme de défis et de projets, qui a repris l'institution parisienne Apicius et qui publie son grand livre mettant à l'honneur un savoir-faire nourri d'expériences multiples depuis plus de vingt ans.

Publié le 29 octobre 2018 à 18:18

L’Hôtellerie Restauration : Quand avez-vous su que vous vouliez devenir cuisinier ?

Mathieu Pacaud : Pour commencer, je n’aimais pas l’école. En revanche, travailler et voir le résultat immédiat des choses me plaisait. À 15 ans, on m’a mis chez Benoît Guichard au Jamin et ce métier m’a plu avec lui. Un peu moins ensuite avec d’autres. Selon les périodes, j’ai eu envie d’arrêter car c’était dur, puis je continuais. C’est en travaillant ensuite avec mon père [Bernard Pacaud, 3 étoiles Michelin, NDLR] à l’Ambroisie, que j’ai définitivement accroché avec la cuisine. J’ai commencé vers 15 ans et j’ai 37 ans. J’ai passé plus de temps en cuisine, vingt-deux ans, que nulle part ailleurs. J’ai dû passer 80 % de ma vie dans des restaurants. Quand j’étais très jeune, je me disais que quand je serai chef, je travaillerai moins. Ce n’est pas vrai ! C’est pire.

 

Comment définiriez-vous votre cuisine ?

Je pense qu’on peut dire qu’elle est élégante et juste. Je ne dirai pas qu’elle est technique ou moderne. Que ce soit pour un grand restaurant ou un autre plus abordable, elle reste toujours chic, y compris dans les arts de la table et dans la façon dont elle est servie. J’explique à mes équipes que certains goûts sont vulgaires, comme l’ail, le lardon, tout ce qui est à base de fromage… On peut vite arriver dans la vulgarité, alors que tous ces produits travaillés d’une certaine manière peuvent être super élégants. L’élégance, c’est le bon dosage. Ma cuisine respecte les codes de la gastronomie traditionnelle. Avec une cuisson parfaite, un bon assaisonnement et des produits de grande qualité, on a la base. D’ailleurs, même dans la sélection des produits, je reste élégant. J’essaye d’apporter de l’émotion dans la présentation et de l’élégance et de la justesse dans les goûts.

 

Vous avez obtenu 2 étoiles à Histoires à Paris et vous êtes parti dans une nouvelle aventure avec la reprise d’Apicius. Pourquoi ?

J’ai monté Hexagone et Histoires avec des copains, et je me suis rendu compte que j’avais besoin de mon indépendance et d’être majoritaire au capital. Apicius est une maison extraordinaire. Je suis associé à 50/50 avec Laurent de Gourcuff [groupe Noctis]. Avec lui, j’apprends un autre métier car il a un vrai savoir-faire dans le festif et l’événementiel. Or, Apicius est un lieu que je voulais festif. C’est l’associé idéal. On avance chacun dans son domaine. Apicius est déjà une institution et je veux qu’elle perdure dans le temps. Je veux en faire le plus beau lieu de Paris. On a tout refait à l’intérieur. On va entamer une deuxième série de travaux pour peaufiner la décoration, ainsi que les jardins. On investit au fur et à mesure.

 

Un bilan six mois après l’ouverture ?

Une reprise, c’est beaucoup plus compliqué qu’une création parce qu’on doit faire avec la clientèle existante. Au bout de trois mois, je me suis dit que c’était à eux de s’adapter à moi. On a fait des travaux. C’est un lieu nouveau et objectivement, ça marche beaucoup mieux maintenant.

 

En plus d’Apicius, que ce soit en Corse ou à Paris, vous signez des cartes. Comment abordez-vous la création ?

Chaque lieu a son identité et j’ai mis en place des trames de création. Par exemple, au Domaine de Murtoli, c’est un menu unique qui doit utiliser majoritairement des produits corses dont ceux de nos jardins. Avec trois années de recul, on sait ce sur quoi on peut compter. Cette année, on a monté le niveau de façon spectaculaire. J’ai une vision très précise de ce que je veux à Murtoli. Oui, cela prend du temps de mûrir un projet. On change la carte à Apicius et je peux dire que c’est la première carte où tout est vraiment bien et où il n’y a pas de débat.

 

Votre plat préféré à la carte ?

Un Turbot au sarrasin et au coquillage avec une huile de cresson. C’est frais et beau.

 

Votre plat best seller ?

La Tropézienne de langoustine au caviar.

 

Vous avez annoncé l’ouverture prochaine de l’Ambroisie Macau. Où en est le projet ?

Cela prend du temps car ce restaurant est dans un immeuble neuf. Pour nous, tout est prêt, même l’équipe est sur place. C’est un projet sur cinq ans qui arrive à son terme avec les diverses autorisations nécessaires avant ouverture. Ce sera la réplique exacte de l’Ambroisie Paris pour la cuisine et l’on veut l’amener à un niveau 3 étoiles Michelin. Pour la décoration, cela n’a rien à voir. Si l’on arrive à réaliser cet exploit, on pensera à en développer d’autres.

 

Le dernier repas le plus époustouflant ?

Le dernier repas où j’ai été surpris, c’était chez Yannick Alléno, chez Ledoyen. Tout était chic et incroyable. J’y suis allé quatre ou cinq fois cette année et à chaque fois, c’était très bien.

 

Un rêve à réaliser ?

Des rêves professionnels, j’en ai plein. J’ai un projet de dingue qui est un rêve et sur lequel je commence à travailler. Je ne sais pas si je vais y arriver. C’est un rêve à 100 M€ à long terme. Je le mûris. Tout ce que je veux, je l’ai. Ma force, c’est ma volonté.

 

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Collection Mathieu Pacaud – Volume 1

Ce beau livre de 816 pages est la substance extraite de deux années de cogitations du chef et de ses équipes. Une synthèse de talents qui s’exprime à travers 350 recettes présentées sous forme d’abécédaire par lesquelles Mathieu Pacaud nous fait profiter de sa vision contemporaine de la gastronomie. “Ce n’est pas un livre qu’on lance mais une collection, une dynamique, explique Mathieu Pacaud. On travaille déjà sur le deuxième volume plus axé sur le végétal et qui fera aussi 800 pages. En parallèle, on prévoit aussi un spécial pâtisserie. Mon idée, c’est d’avoir cinq volumes dans dix ans avec une même trame et une même vision. Pour s’inscrire dans la postérité, il n’y a qu’un livre. Le reste est vite oublié. Collection Mathieu Pacaud - Volume 1, il n’y en a que 4 000 exemplaires et pas un de plus.”

Collection Mathieu Pacaud - Volume 1
Mathieu Pacaud et Philippe Vaures Santamaria (photographe)
Collection Le verre et l’assiette • Éditions Glénat
Prix : 150 €

 

 


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Publié par Nadine LEMOINE



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