En France, la livraison de repas s'est longtemps cantonnée à un trio
historique. Dès 1998, le pionnier Allo Resto sert d'intermédiaire entre les
consommateurs et les restaurants qui assurent eux-mêmes la livraison. Racheté
en 2012 par le leader européen Just Eat, cet annuaire domine toujours le
marché, avec 600 000 clients actifs et 4 000 établissements partenaires
(sur les 7 000 qui livrent eux-mêmes). Chronoresto, devenu Pages Jaunes
Resto en 2015, adopte un modèle comparable. Quant à Resto-In, fondé en
2005 et racheté en novembre dernier par La Poste, il se différencie à double
titre : il intègre la distribution de plats et référence des enseignes
plus haut de gamme.
Un univers concurrentiel
Aujourd'hui, le marché est en pleine ébullition, avec l'arrivée du belge
TakeEatEasy en novembre 2014, de l'anglais Deliveroo en avril, puis de l'allemand
Foodora en mai dernier. Ils se différencient avec la géolocalisation de leurs
livreurs en temps réel, des délais réduits (30 minutes environ), une offre
premium (adresses branchées…), et de vastes ambitions. Deliveroo a levé
179 M€ cette année et revendique, tout comme Foodora, 500 établissements
en France. De son côté, Take Eat Easy cible les 750 restaurants d'ici la
fin de l'année. Seul bémol : les montants des commissions auprès des
enseignes sont élevés (autour de 25-30 %).
UberEats entend lui aussi croquer une part du gâteau, avec un
positionnement atypique axé sur l'offre déjeuner. Présent dans les quartiers d'affaires
de Paris depuis octobre, il propose chaque jour trois à quatre plats uniques,
concoctés par autant de restaurants différents et livrés en moins de dix
minutes.
Enfin, des acteurs alternatifs se sont lancés. C'est le cas de traiteurs
dématérialisés comme FoodChéri et PopChef. Dans le sillage de l'américain
Munchery, ils maîtrisent l'ensemble de la chaîne, de la production dans leur
laboratoire à la livraison. Autres singularités : une offre simplifiée au
maximum (deux plats, un ou deux desserts…), des prix accessibles (plat à moins
de 10 €) et une livraison chronométrée (15 à 20 minutes).
Un mode de consommation dans l'air du temps
"La livraison est en train d'exploser. C'est l'avènement du click and
eat", estime François Raynaud de Fitte, cofondateur de Popchef.
Plusieurs facteurs peuvent expliquer cet engouement : la généralisation
des smartphones facilite les commandes, la durée des déplacements entre lieu de
travail et domicile réduit le temps libre, les Français cuisinent moins… Mais
si la livraison aiguise autant les appétits, c'est que l'Hexagone est à la
traîne, loin derrière les États-Unis ou la Grande-Bretagne. NPD Group a certes
noté une progression de 4 % de la fréquentation en un an pour un segment
qui pèse désormais 4,7 milliards d'euros. Cependant, les perspectives
laissent rêveur. Selon Rocket Internet, le marché mondial devrait peser
90 milliards d'euros d'ici 2019.
Publié par Violaine BRISSART