Les métiers de salle n'ont pas la cote auprès des jeunes. Le 23 janvier dernier, les premières assises des métiers de salle ont rassemblé 260 professionnels à la chambre de commerce et d'industrie de Paris (CCIP) pour tenter de comprendre pourquoi il est si difficile d'attirer de futurs candidats. Cette journée faisait suite à la mission interministérielle pilotée par Régis Marcon, avec le ferme soutien du Fafih. Ainsi, lors de la table ronde 'La formation : quels contenus pour une autre image des métiers de la salle ?', il convenait d'explorer les pistes permettant de repositionner les métiers de salle au sein du secteur. Selon le rapport 2010 du Fafih, 56 % des jeunes formés aux métiers de la restauration et de l'hôtellerie passent trois ans dans ce secteur après leur sortie de formation. 64 % des jeunes présents dans les entreprises ne disposent d'aucune formation initiale spécifique à ces métiers. Les serveurs et employés polyvalents sortent rarement de filières spécialisées restauration. Le constat est simple : le métier manque d'attrait et la formation est inappropriée. Alors, comment faire rêver les jeunes ? Tout d'abord, en intégrant la théâtralisation dans les cours, et en revisitant les techniques pour casser les codes. L'innovation en formation serait un levier indispensable.
La notion de savoir être
Les acteurs de la table ronde se sont ensuite interrogés sur la notion de savoir être, qui passe par l'éducation, les règles de savoir vivre, l'hygiène, les valeurs humaines (générosité, partage, etc.). Il convient également de prendre davantage en compte l'évolution du métier, à savoir l'accueil, la communication et la commercialisation. En entrant en école hôtelière ou en CFA, les jeunes sortent du 'cocon familial' et il n'est pas toujours facile pour eux de se confronter aux réalités du métier. Apporter une touche 'ludique' dans le référentiel les motiverait : ateliers de théâtre, de chant, voire de relooking, les propositions ne manquent pas. Ces différents travaux sur la posture, les gestes, le corps et la voix permettraient aux novices de gagner en confiance, d'affirmer leur personnalité, les aideraient à véhiculer une image positive d'eux-mêmes, à croire en leur potentiel. Pour appuyer cette démarche, des partenariats avec le monde associatif et artistique sont envisagés, mais aussi une synergie avec des élèves d'autres filières (fleuriste, esthétique...). Autre point important : la tenue professionnelle. Il faudrait miser sur l'élégance pour que tout jeune puisse s'approprier une identité professionnelle en développant un sentiment d'appartenance. Fini le cliché du 'costume-cravate', pourquoi, par exemple, ne pas proposer une tenue moderne, en partenariat avec une marque de vêtement clairement identifiée par les jeunes ?
Des programmes scolaires en adéquation avec les entreprises
Le contenu des programmes pédagogiques est également à redéfinir, en fédérant, par exemple, les centres de formation avec les entreprises afin de permettre des passerelles entre les acteurs par des interventions conjointes sous forme de travaux pratiques déplacés. C'est-à-dire, ancrer la formation dans la réalité professionnelle de ces structures et dans la diversité des concepts de restauration. Il faudrait ensuite construire le référentiel en partant du produit pour que les élèves aient la possibilité de rencontrer des producteurs, des éleveurs et des viticulteurs pour et qu'ils puissent enrichir leurs connaissances et ainsi mieux assurer leurs ventes une fois face aux clients. Autres pistes : avoir une approche davantage décloisonnée entre la cuisine et la salle, les enseignements professionnels et généraux ; ou encore proposer une formation continue aux enseignants (immersion en entreprise). La maîtrise d'une langue vivante - voire d'une deuxième - est indispensable, avec des mises en situation professionnelle pour faciliter son apprentissage. Sont restées en suspens quelques remarques sur le contrôle en cours de formation (CCF), dans lequel les professionnels regrettent de ne pas être suffisamment impliqués. Faudrait-il créer une charte ? Ou un élément de labellisation du centre de formation ?
Les nouvelles technologies en ligne de mire
Au-delà du contenu des programmes, il serait nécessaire de s'emparer des nouvelles technologies afin de rendre la formation plus attrayante pour les jeunes. L'objectif premier est que l'élève soit acteur de ses propres études. Il existe de nombreux moyens pour y parvenir : utiliser les réseaux sociaux, créer un blog qui retranscrirait les techniques apprises en cours, ou user des vidéos pour le travail sur le savoir être par exemple. Mais aussi communiquer davantage sur le site du Centre de ressources nationales hôtellerie restauration (CRNHR) afin d'en faire la promotion pour les usages de la webTV.
Si le déficit d'image et de reconnaissance des métiers de salle pèse lourdement sur l'emploi du secteur, les pistes de travail qui viennent d'être envisagées vont permettre d'étayer la réflexion de la 17e commission paritaire consultative du ministère de l'Éducation nationale. Dans l'unique but de valoriser ce corps de métier nécessaire à la profession. Régis Marcon en est convaincu : "La formation des métiers de salle est un enjeu majeur pour l'avenir des jeunes. Il faut rendre le métier ludique, l'adapter aux demandes de l'entreprise, s'adapter au service actuel et encourager les formateurs en restaurant." Dans l'immédiat, les travaux des groupes et questionnaires distribués le 23 janvier dernier vont être traités pour réaliser un document récapitulatif. Il sera, par la suite, envoyé dans les écoles hôtelières, aux CFA, syndicats, et autres corporations. En attendant ce bilan complet, les 'deuxièmes assises' sont d'ores et déjà prévue pour 2013. L'horizon des métiers de salle semble s'éclaircir.
Publié par Hélène BINET