“Nous ne percevons pas de baisse de pouvoir d’achat chez nos clients, affirme Xavier Castillan, propriétaire de la Table du campagnard à Treffort (Isère). Il est vrai que nous sommes à la campagne et que nos visiteurs ne s’engagent pas sur un déplacement chez nous sans savoir à quoi s’attendre. La problématique est sans doute différente en ville. Je vois parfois à la télévision des gens exprimer leur impossibilité de se rendre au restaurant par manque d’argent. Mais on les retrouve dans les grandes surfaces avec le caddie rempli de plats préparés alors qu’un kilo de patates coûte 1 €.” Pour le Maître restaurateur, ce serait plus le mode de vie et l’éducation que le pouvoir d'achat qu’il faudrait incriminer. “Les priorités ne sont plus les mêmes. Dans sa classe, ma fille est la seule à cuisiner. Les gens vont au restaurant pour se nourrir alors qu’on peut aussi s’y rendre pour manger !”
Une vision que nuance Hubert Jan, à l’autre bout de la France, à Fouesnant (Finistère), où en plus de son activité syndicale, il exploite le Bistrot Chez Hubert. “La baisse du pouvoir d’achat impacte réellement une clientèle importante de nos établissements. Ce sont les seniors. Ils nous disent très clairement qu’ils vont rogner sur leurs visites au restaurant”, déclare le président d'Umih Restauration. Un constat qui rejoint une étude de l’Insee. Si le niveau de vie des Français a légèrement augmenté entre 2008 et 2016 (+ 0,84 %), la classe d’âge des 50 à 65 ans a vu son pouvoir d’achat s’effondrer de 3,81 %. Les 'quinquas' peinent à mettre de côté pour leur retraite et 33 % d’entre eux renonceraient à une sortie comme aller au restaurant.
D’autres loisirs que se rendre au restaurant
Que ce soit en raison d'une réaffectation des budgets loisirs en fonction de nouvelles priorités ou d’un appauvrissement récent des clients, les restaurateurs constatent les changements d’usages et de comportements. En Martinique, Luc Bazely, qui exploite la Case Thaï à Trois-Îlets, a vu son activité se durcir plus par les nouvelles lois que par la conséquence d’une éventuelle baisse du pouvoir d’achat : “Cela fait bien longtemps que nos clients ne consomment plus d’alcool pour ne pas avoir de problèmes sur la route, mais à table, ils invoquent parfois la baisse de pouvoir d’achat pour prendre un cocktail de fruits, moins cher.”
À La Mascotte, au cœur de Montmartre à Paris (XVIIIe), Thierry Campion garde un œil rivé sur les chiffres de sa brasserie : “Nous sommes en dessous de ceux de 2008 après la crise des subprimes. C’est dire notre inquiétude. Je ressens un effet anxiogène dû au mouvement des gilets jaunes, qui dure depuis bientôt six mois. Cette ambiance pèse sur le moral et la consommation de nos clients”, tente le restaurateur, qui s’adapte en permanence aux changements. “Des produits comme la sole ou la côte de bœuf séduisent toujours une partie de notre clientèle. Mais il faut aussi attirer les jeunes qui n’ont rien à faire de la veste blanche, d’une nappe amidonnée ou des produits de luxe. Pour eux, l'expérience est aussi importante que l’assiette. Le souci de ne plus dépenser comme avant justifie que nous mettions à la carte des produits plus simples mais pas moins bons, comme le saumon par exemple”, envisage Thierry Campion.
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Publié par Francois PONT
mercredi 1 mai 2019