L'expert et la sécurité sanitaire des aliments

Jeudi 24 mai, la Compagnie des experts judiciaires en activité agricole a tenu son séminaire annuel à l'Agro Paris Tech de Massy (91). L'occasion pour chacun de débattre et d'échanger sur un thème très sensible. Extraits.

Publié le 30 mai 2012 à 20:05

La Compagnie des experts judiciaires en activité agricole (Cepaa), présidée par Philippe Heckle compte 52 membres (sur les 600 recensés au niveau national) répartis en plusieurs collèges dont l'agroalimentaire, qui est le plus important. Parmi ses membres, elle compte notamment des vétérinaires, des ingénieurs et des professionnels dont l'expertise est reconnue. Ceux-ci peuvent être appelés par un juge pour donner leur avis sur des questions techniques dans le cadre d'une affaire judiciaire. L'intervention de l'expert judiciaire donne lieu à un rapport écrit dont les conclusions ne s'imposent pas au juge. En pratique, cependant, dans 90 % des cas, le juge suit ses conclusions. Il est aussi qualifié de collaborateur occasionnel du juge.

Pour devenir expert judiciaire, ces professionnels ont dû postuler près de la cour d'appel de Paris. Sur les 5 000 dossiers déposés chaque année, 140 sont retenus sur la base de leur compétence, de leur notoriété et des besoins de la justice. Plus de 50 % des litiges concernent des problèmes de malfaçon dans le bâtiment, suivis par la médecine, avec 30 % des conflits.

Après un examen attentif de leur candidature, ces professionnels sont inscrits sur une liste établie par la cour d'appel, pendant une période probatoire de deux ans. Durant cette période, la Cepaa va former ces nouveaux membres aux règles de procédure juridique, à la méthodologie et la rédaction des rapports d'expertise. La compagnie va leur transmettre les traditions de dignité, d'indépendance, de probité et d'éthique qui sont la règle de conduite des experts. Au terme de ces deux années probatoires, l'expert est nommé pour cinq ans.

Deux professionnels du secteur de la restauration ont été retenus comme experts près de la cour d'appel de Paris. Gérald-Louis Canfaïlla, ancien directeur général de Lasserre et président du jury national du concours Un des Meilleurs ouvriers de France dans la catégorie maître d'hôtel et du service des arts de la table. Son domaine de compétence est le contrôle qualité de la chaîne alimentaire en restauration de luxe, traditionnelle, d'entreprise et de collectivité. Il a été appelé a donner son expertise sur des problèmes du respect de la chaîne du froid ou sur la traçabilité des produits le conduisant à remonter toute la filière jusqu'aux abattoirs afin de voir à quelle étape un produit avait été altéré.

Patrick Derderian, concepteur et ancien dirigeant des restaurants, l'Amanguier, Oh ! Poivrier ! Bermuda Onion, Zébra Square, mais aussi consultant en conception restaurant et hôtellerie de luxe est le deuxième expert. Ses domaines d'intervention concernent la conception et la gestion de restaurant et d'hôtel de luxe, ainsi que les préjudices à estimer, les contentieux liés au matériel, au mobilier et aux fournitures installés et utilisés dans les locaux d'un restaurant ou d'un hôtel de luxe. Il est aussi fondé à expertiser des fonds de restaurants. Il a déjà été sollicité notamment dans un conflit opposant un restaurateur et son décorateur sur la qualité du travail effectué par rapport au cahier des charges. En revanche, saisi pour un problème d'appellation et de conservation de pommes de terre, il a préféré transmettre le dossier à un autre expert de la compagnie qui avait les compétences requises. L'un des avantages d'appartenir à une compagnie d'experts : pouvoir échanger et mutualiser les connaissances respectives de chacun. C'est la raison par laquelle, nombre d'experts viennent participer aux séminaires annuels organisés par la Cepaa, véritable session de formation avec des intervenants d'horizons différents mais aussi lieu de rencontre et d'échanges entre expert aux compétences complémentaires.

 

Quelle sécurité pour les aliments ?

Alain Blogowski, ancien secrétaire interministériel du Conseil national de l'alimentation (CNA) part du constat qu'on assiste à une demande de sécurité alimentaire absolue. Les consommateurs revendiquent des produits alimentaires sains, c'est-à-dire dont la sécurité sanitaire est garantie et dont les modes de production répondent à des caractéristiques bien précises. Or, ces deux attentes pouvant parfois se révéler contradictoires. Le petit agriculteur étant paré de toutes les vertus et les gros industriels de l'agroalimentaire de tous les vices, le consommateur se retourne beaucoup plus facilement contre les gros que le petit.

Au cours de ces trois dernières années, un certain nombre de crises sanitaires graves, en lien direct avec l'alimentation, ont fait la une des médias et sont venues alimenter ces angoisses : huiles frelatées, 'vache folle', poulets contaminés à la dioxine, les graines germées porteuses de bactérie e-coli…

Même si l'on peut déplorer des décès, on constate dix fois moins de morts que sur la route. Les agents responsables de ces décès sont des bactéries dans 90 % des cas, et plus particulièrement des salmonelles ou des listérias. Cependant, l'hygiène est bien maitrisée en France. 60 % des toxi-infections alimentaires (TIAC) interviennent en restauration collective et 40 % en restauration familiale. Ces chiffres mettent en évidence la nécessité de poursuivre l'information et la formation des professionnels, mais aussi celles des consommateurs eux-mêmes. Il convient de rappeler à tous l'importance du respect des règles en matière de conditions de stockage et de conservation des aliments, du respect de la chaîne du froid, de l'hygiène de la préparation avec le lavage des mains, des ustensiles des aliments. D'où la nécessité d'assurer la formation du personnel. De nombreux contrôles à toutes les étapes de la chaîne alimentaire, de la fourche à la fourchette, sont assurés. Ces contrôles, opérés par les services de l'État et les réponses apportées par les professionnels, montrent une amélioration de la sécurité sanitaire dans les établissements de restauration.

Responsabilité juridique des acteurs en matière de sécurité des aliments

Marine Friant-Perrot, maître de conférences en droit privé à la faculté de Nantes (44), fait un rappel historique de l'apparition de ce nouveau droit alimentaire. Un tournant historique après les crises sanitaires des années 1990 (encéphalite spongiforme bovine, dioxine, OGM) qui ont donné lieu à de vives critiques à l'encontre des insuffisances du droit et de l'action communautaire.

De nouvelles règles ont été mises en place, qui se sont traduites par l'européanisation forcée de la sécurité et l'adoption du règlement 'Food Law' en 2002 qui concerne tous les niveaux de la chaîne alimentaire. Les professionnels ont désormais une obligation de résultat avec la mise en oeuvre des moyens adaptés. Parmi ces obligations, citons la traçabilité des produits, l'auto-contrôle des entreprises, la coopération des entreprises, la sécurité des produits, la conformité des produits à la réglementation, la loyauté des transactions, l'information des consommateurs... La plupart de ces obligations existaient déjà mais ont été renforcées.

 

Rôle de l'expert dans la sécurité alimentaire
François-Henri Bolnot, chef de service sécurité sanitaire des aliments à l'École nationale vétérinaire de Maison-Alfort (94) rappelle que le périmètre d'intervention de l'expert en matière de sécurité des aliments est calqué sur celui de la chaîne alimentaire. Avec cette nouvelle réglementation, on n'a plus les outils disant ce qu'on a le droit de faire ou non, on doit mettre en oeuvre les moyens pour obtenir ce résultat. Pour y parvenir, les professionnels peuvent s'appuyer sur le guide des bonnes pratiques en matière d'hygiène, qui est la référence des professionnels et des pouvoirs publics. Dans chaque entreprise, de la plus petite à la plus grande, on doit enfin trouver un plan de maîtrise sanitaire.


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Publié par Pascale CARBILLET



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