L'Hôtellerie Restauration : Comment ressentez-vous le marché de ventes de fonds de commerce dans votre région en cette fin d'année 2014 ?
Bernard Baduel : On sent depuis quelque temps déjà un glissement du marché. Les acquéreurs sont moins nombreux tandis que le nombre de vendeurs évolue à la hausse. Le marché se durcit et les prix se stabilisent. Parallèlement, les délais de signature s'allongent. Auparavant, une vente était conclue en trois mois, alors qu'aujourd'hui une vente aboutie nécessite en général quatre à cinq mois minimum. Le marché se complexifie en raison de la conjoncture économique difficile et d'une réglementation de plus en plus riche - permis d'exploitation, normes de sécurité, baux commerciaux, etc. Il est plus difficile de mener une vente à terme. D'un autre côté, s'il y a moins de ventes, celles-ci sont de meilleure qualité. C'est valorisant pour notre métier de conseiller spécialisé car nous pouvons réellement faire valoir notre expertise auprès de notre clientèle.
Quelles sont les affaires qui se vendent le mieux dans votre secteur géographique ?
Contrairement aux régions frontalières et à certains zones de province, le bar-tabac et le tabac-presse sont des produits leaders. Ce segment, où la demande reste supérieure à l'offre, représente 25 à 30 % de notre portefeuille d'affaires. Plusieurs facteurs expliquent cette tendance : notre secteur géographique que sont les départements de l'Essonne et du Val-de-Marne où il y a une forte densité de population couplée d'une riche diversité de quartiers - bureaux, résidentiels, axes routiers ou gares - et de communautés. D'autre part, les remises tabacs*, loto et PMU en font un produit aisément rentable. Enfin, les acquéreurs apprécient la casquette de débitant de tabac qui leur permet de se constituer une retraite complémentaire à celle de commerçant. La communauté asiatique a bien compris que cet aspect était un vrai avantage et se montre particulièrement friande de ce type de commerce.
Quels sont les prix du marché sur ce segment ?
Il est très difficile de donner une moyenne car la diversité de ce type de commerce dans notre secteur est immense et les prix sont très variables en fonction de l'emplacement de l'affaire, de son environnement, de sa taille... De manière générale, on évalue un bar-tabac à trois fois la remise tabacs annuelle nette et une fois la remise jeux. En pratique, on estime que lorsque l'affaire est en bonne santé, les remises tabacs et jeux sont censées couvrir le loyer et le crédit. L'activité de bar ou de brasserie qui vient en complément apparaît comme une source de profit. Or la rentabilité d'une brasserie ou d'un bar - et par conséquent sa valeur de marché - sont très étroitement liées à la manière dont elle est gérée, au regard de l'emplacement du fonds. Il est trop difficile de donner ici une moyenne. En revanche, on peut dire que lorsque nous étudions l'activité, nous estimons que les trois indicateurs clés sont les ratios matières premières*, masse salariale* et le loyer.
Qu'en est-il des bars-brasseries ?
Une affaire de type 30-50 couverts avec licence IV et bien située se vendra en moyenne 120 % du chiffre d'affaires et trois fois le Perf*. Mais encore une fois les prix sont très variables en fonction de l'emplacement de l'affaire et de son potentiel.
La restauration rapide demeure-t-elle plébiscitée ?
Non, notre secteur est clairement arrivé à saturation sur ce segment qui est souvent associé à une faible rentabilité. Sur le segment des sandwicheries et ventes à emporter, nous constatons plus de créations de fonds avec achat de droit au bail. Quand il y a cession, les prix s'établissent en moyenne aux alentours de 80 % du CA HT et trois fois le Perf.
La restauration traditionnelle subit-elle la même tendance ?
Non, elle reste plutôt stable. Les crêperies et pizzérias demeurent bien cotées avec une évaluation moyenne comprise entre 80 et 100 % du CA et trois fois le Perf. Un restaurant classique non gastronomique avec un CA de 200 000 € s'évalue plutôt dans une fourchette comprise entre 70 et 90 % du CA. Ce chiffre tombe à 40-60 % du CA pour la restauration gastronomique.
Publié par Propos recueillis par Tiphaine Beausseron