Hôtellerie-restauration : savoir concilier activité professionnelle et vie personnelle

Horaires élastiques, coups de feu, stress, imprévus… Pas si simple de passer d'un univers à un autre, sans emporter les soucis professionnels à la maison, et inversement. Une question d'organisation, mais pas seulement.

Publié le 15 février 2013 à 17:03

"On peut vite se laisser déborder", confie la jeune directrice d'un hôtel trois étoiles à Paris. "Entre les clients, les fournisseurs, le personnel, les rendez-vous, je n'ai pas une minute à moi", reconnaît-elle, son smartphone à la main. "Je ne m'en sépare jamais. Même le week-end, mon téléphone me suit partout." La vie personnelle de cette célibataire ? "Un peu de shopping les jours de congés et le rattrapage de mes heures de sommeil en retard, dès que c'est possible." Un discours qui pourrait dissuader d'entamer une carrière dans l'hôtellerie. "Je débute à ce poste. Je dois d'abord trouver mes marques avant de penser à ma vie personnelle". Mais les profils plus chevronnés ont-ils tous surmonté cette "peur de mal faire, de se tromper, de rater quelque chose" ?

Avec une femme et quatre enfants, âgés de 2 à 14 ans, Anthony Torkington reconnaît que s'il n'avait pas "une épouse qui gère la famille", il aurait des difficultés à concilier vie privée et activité professionnelle. Directeur de l'hôtel Saint-James à Bouliac (33), après avoir dirigé notamment le Mas Candille à Mougins (06), il confie de surcroît que sa femme "a travaillé dans l'hôtellerie. Elle connaît et comprend les contraintes du métier". La principale étant la disponibilité : "j'ai mon téléphone 24 heures sur 24 avec moi et je consulte mes e-mails sept jours sur sept. Je préfère savoir ce qui se passe et gérer un problème à distance, plutôt que de rattraper une catastrophe."

"Une implication de tous les instants"

Émilie Laumonier, qui a ouvert L'Endroit en octobre dernier à Angers (49), admet que son restaurant lui demande "beaucoup de temps" : "je suis en cuisine dès 8 heures le matin". Puis, à midi, c'est le coup de feu, et l'après-midi, L'Endroit devient salon de thé. Pas de répit jusqu'à la fermeture, vers 18 heures. Or, Émilie Laumonier est mère de trois adolescents. "J'ai de la chance, dit-elle, le lycée est voisin de mon restaurant. Du coup, mes enfants viennent goûter ici. Ce qui me permet de les voir et d'être certaine de la qualité de ce qu'ils mangent." Même volonté de préserver sa famille du côté de Catherine Pasquet, qui vient de créer Osé, un restaurant, salon de thé et concept-store, toujours à Angers. Elle n'ouvre ni le soir, ni le week-end, "pour pouvoir [s]'occuper de [s]a fille de 9 ans". Un parti pris assumé et revendiqué. Car si l'on ne se donne pas de limites, la restauration peut être "une implication de tous les instants", constate Arnaud Duhem, à la tête de la société de conseil Carpe Duhem. "Lorsque j'ai participé à l'ouverture du Shangri-La à Paris, je travaillais 15 à 17 heures par jour, sept jours sur sept. Pendant un an, je n'ai quasiment pas vu ma famille."

"Savoir s'entourer de personnes compétentes"

Pour limiter les horaires élastiques, Anthony Torkington part du principe qu'il faut "savoir s'entourer de personnes compétentes". Il faut apprendre à déléguer. Une recette qui a fait ses preuves dans de grands établissements comme dans les plus petits. Chez Martine's, snack chic du VIe arrondissement de Paris, elles ne sont que deux "pour tout faire". La patronne, Martine Macra, et Soizic Allain, ancienne élève de l'École Maxim's. À l'instar de sa manager, Soizic Allain peut "préparer des soupes, des plats, des jus de fruits, servir en salle, gérer des livraisons, accueillir des clients, encaisser". Une relation de confiance s'est installée entre les deux femmes. Lorsque les clients se font plus rares, en fin de journée par exemple, Martine Macra invite son employée "à partir un peu plus tôt, car elle a un long trajet pour rentrer chez elle". De petits arrangements qui se généralisent. "Le groupe Marriott a fait en sorte que je puisse profiter de la naissance de mes deux filles", explique Doris Schaefgen, directrice générale de l'hôtel Renaissance Paris Arc de Triomphe. On lui a créé un poste de directeur de la formation, assorti d'horaires plus souples, répartis sur trois jours par semaine.

"Concilier vie professionnelle et vie personnelle, c'est aussi savoir quitter son rôle de chef d'entreprise pour endosser celui de père de famille, une fois de retour à la maison", souligne encore Anthony Torkington. Autrement dit : savoir passer d'un job à un autre, sans emporter les soucis professionnels à la maison, et inversement.


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Publié par Anne EVEILLARD



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