Être un chef français à Dubaï : un Eldorado précaire

Dubaï (Emirats Arabes Unis) Christophe Prud'homme dirige depuis six ans les cuisines des seize restaurants de deux hôtels de luxe à Dubaï, l'Al Bustan et l'Al Murooj de la chaîne Rotana.

Publié le 17 mars 2014 à 11:06
Dubaï est une plaque tournante du trafic aérien mondial, un carrefour à mi-chemin entre l'Europe et l'Asie. L'Émirat est aussi une terre d'affaires, de loisirs et de luxe. Pour les chefs de cuisine, la cité-État peut constituer un véritable Eldorado. Ainsi de Christophe Prud'homme, chef exécutif des cuisines de l'Al Bustan et de l'Al Murooj, deux hôtels de luxe dubaïotes. Il dirige depuis six ans les 160 cuisiniers des seize restaurants - aux nombreuses spécialités culinaires - des deux établissements de la chaîne Rotana. "Ici, ce qui prime c'est la qualité, confie-t-il. Les produits viennent du monde entier. Il y a du local comme les légumes, identiques à ceux du jardin, l'agneau, le poisson... L'huile vient d'Italie, les fruits d'Inde ou des Philippines, de la viande de Nouvelle-Zélande et d'Australie. Pas de France, car nos races à viande ne se sont pas assez tendres pour le palais de mes clients. Le Black Angus des États-Unis est celle qui marche le mieux. Je reçois toutefois des victuailles de Rungis, deux fois par semaine. Des huîtres de Bretagne, par exemple." Les restaurants qu'il dirige proposent une grande diversité culinaire : thaïe, "faite par des cuisiniers thaïs", japonaise ("avec des chefs Philippins, les Japonais sont trop chers"), steak house, cuisine libanaise, buffet international avec de la cuisine arabe ou italienne, snack pour la piscine... Les établissements proposent aussi un service banquet et traiteur. Tout cela donne "10 000 € d'achat de matière première par jour, pour plus de 3 000 couverts".

Plaire à tous

"C'est un vrai travail de chef d'entreprise. Chaque restaurant a sa cuisine et il y en a une pour les banquets et une pour le traiteur. Il faut aussi de la passion. Ici, tout fonctionne à l'affectif." Car les conditions de travail à Dubaï sont particulières. Christophe Prud'homme ne bénéficie d'aucune sécurité de l'emploi. Il bénéficie certes d'un bon salaire, mais il risque d'être remercié du jour au lendemain si son propriétaire n'est pas satisfait. "Les salaires sont bien meilleurs qu'en France, estime le chef. Mais les conditions de travail, de couverture sociale et de vie sont bien différentes aussi. Et parfois cela m'inquiète un peu quand je pense au retour au pays." La méthode de Christophe Prud'homme pour s'en sortir : s'efforcer de contenter tout le monde. "Il faut plaire aux clients bien sûr, à l'entreprise qui gère, mais aussi au propriétaire local. Donc il ne faut pas prendre de risques inutiles. Par exemple, mes croissants sont pur beurre - qui vient de France. C'est la condition nécessaire pour avoir de la qualité."

Le chef n'oublie évidemment pas la gastronomique française, même si elle n'est pas présente en tant que telle. "Notre cuisine est appréciée, témoigne-t-il. Le propriétaire est fier d'avoir un chef français. De plus, en 2010, je suis devenu Maître cuisinier et j'ai aussi été nommé chef de l'année pour le Moyen-Orient. J'aimerais pouvoir mettre un peu plus en avant ce qui fait notre métier."

Photo

Publié par Pierre BOYER



Commentaires
Photo

En cliquant sur publier vous acceptez les [conditions générales d'utilisation]

Voir notre Politique des données personnelles