Il est fréquent de voir des suites de palaces ou d'hôtels 5 étoiles être réservées pour présenter une collection de vêtements, de nouveaux objets ou accessoires. Mais pour le visiteur, l'expérience s'arrête là. Il voit, il touche, il manipule. Mais difficile de demander à vivre deux jours avec un nouveau smartphone ou de porter une robe le temps d'un soir, juste pour voir, essayer, avant d'acheter. Depuis cet hiver, la marque de design danoise Vipp propose à ses clients de séjourner dans une chambre d'hôtel atypique, située dans un lieu insolite et pensée pour vivre, le temps d'une soirée, d'un weekend ou plus, avec une cuisine Vipp. Ensuite, si on aime cette cuisine, on l'achète et le séjour est offert. Un testing hors des sentiers battus et ce d'autant que chaque chambre d'hôtel sort elle-même de l'ordinaire. Vipp propose en effet d'investir un loft de 400 m2 au coeur de Copenhague (1 000 € la nuit), conçu par l'architecte danois David Thulstrup, ou encore de vivre dans un refuge de 55 m2 construit au milieu d'une forêt suédoise (600 € la nuit). Et d'autres destinations sont d'ores et déjà à l'étude, indique Kasper Egelund, le PDG de Vipp. "Cette initiative est intéressante et originale", commente Adrien Gloaguen, à la tête de plusieurs 3 étoiles à Paris, dont l'Hôtel Bienvenue (9e). Avis partagé par Nadine Witczak, directrice de l'hôtel 3 étoiles Amiral à Nantes (Loire-Atlantique), et par Anna Bidoli, qui dirige le Mercure Paris Place d'Italie (13e). "Il n'y a rien de mieux que de vivre avec un produit avant d'en faire l'acquisition", confie Nicolas Decker, propriétaire et directeur de La Cheneaudière, Relais & Châteaux à Colroy-la-Roche (Bas-Rhin). Adrien Gloaguen souligne toutefois le côté "un peu trop luxe" de l'expérience, en référence aux tarifs de nuitée élevés proposés aux clients. Quant à Marie Borgel, directrice du Saint James à Bouliac (Gironde), si elle décidait de dédier une chambre à un test de produit, "il serait hors de question de ne pas prévenir le client avant. Et s'il était partant pour vivre cette expérience, alors pourquoi pas".
Concernant les produits qu'ils seraient prêts à faire essayer à leurs clients, les hôteliers ont chacun leur point de vue. À l'évocation d'une nouvelle literie, de linge de maison ou encore d'une machine à café, Adrien Gloaguen se dit partant. Anna Bidoli, pour sa part, rappelle que chez Mercure "nous sommes obligés d'utiliser les produits référencés par la marque. Par contre, si le test concerne des petits objets qui ont une plus-value et qui n'impliquent pas de manipulations lourdes par notre personnel… pourquoi pas". "Je serais d'accord pour organiser des testings, si les produits retenus ont du sens pour nous, s'ils ont un lien avec la philosophie et l'univers de La Cheneaudière, et ainsi ne donnent pas l'impression de nous être métamorphosés en showroom", explique Nicolas Decker. Enfin, dernier bémol de Nadine Witczak : "Dans un tel projet, il faut avoir prévu une chambre test, voire plusieurs. Ce qu'une structure comme la nôtre ne peut pas envisager d'un point de vue de rentabilité. Ce serait, en effet, un investissement trop impactant sans garantie de retour." L'hôtelière nantaise voit l'initiative davantage destinée à des établissements de chaînes, "car ils ont des équipes marketing qui peuvent travailler sur les cibles de clients potentielles".
Publié par Anne EVEILLARD