Les équipes de salle sont curieusement absentes des grands flux de visiteurs du musée Escoffier. Pourtant, ce musée-écrin de 300 m2 édifié dans la maison natale d'Auguste Escoffier sait sortir du cadre strict de la cuisine pour valoriser les autres filières associées et notamment la salle. La table dressée d'Oliver Novelli, directeur du restaurant le Chantecler, associée à son titre de MOF, y avait été exposée en 2012 dans le cadre d'une exposition de pièces uniques consacrée aux arts de la table.
L'univers du Maxim's y est présenté cette année jusqu'à fin mai avec des menus et accessoires de tables des années 1900, de la verrerie des années 1930 et de la vaisselle des années 1960, au temps où les lieux étaient tenus par la famille Vaudable. Propulsée dans l'univers d'Auguste Escoffier et de ses successeurs, l'équipe d'Olivier Novelli a particulièrement apprécié la collection des menus du musée, les tables dressées et les oeuvres de l'Apreca mises en lumière par Julie Durand, conservatrice adjointe du musée.
De très jolis outils
"J'ai vu ici des seaux à l'ancienne, de la très belle verrerie, des carafes en cristal magnifiques", témoignait Lionel Compan, chef sommelier. "Dans notre métier, c'est toujours agréable de travailler avec de très jolis outils et voir tous ces témoignages est émouvant car nous exerçons notre métier par passion et cela nous rappelle d'où l'on vient. En même temps, le matériel n'a pas tellement évolué, il est juste plus moderne, plus raffiné, plus design." Même constat pour le dressage de la table.
Le propos a vite dérapé sur la notion du service proprement dit. "Les métiers de la salle ont évolué avec le temps", constate Olivier Novelli. "Ce qui se faisait au début du siècle dernier ne se fait plus forcément en raison des contraintes économiques. On n'a plus autant de personnel en salle, un phénomène qui affecte aussi la cuisine et avec lequel il faut composer." Le MOF poursuit : "Nous ne sommes plus non plus des artisans de notre métier à 100 %, nous sommes aussi devenus des vendeurs, et c'est à nous de nous adapter et de faire évoluer le service dans ce sens-là, sans renier ce qui fait la beauté et la grandeur de notre métier : le service au client."
Un réel savoir-faire
Service à la russe, à la française, à l'anglaise, découpage et flambage en salle : au Negresco, Olivier Novelli et son équipe se battent pour conserver ces spécificités parce que "ça plaît au client, ça nous plaît, ça fait perdurer le métier. Et là encore, il faut savoir s'adapter, pour compenser le manque de personnel et le manque de temps." Conscients d'être porteurs d'un réel savoir-faire, ces représentants des métiers de la salle ont avoué souffrir de se voir reléguer à l'image de porteurs d'assiettes, trop en vogue alors que le métier de chef s'étale sur tous les écrans. "Salle et cuisine, les deux métiers sont complémentaires et ne peuvent exister l'un sans l'autre", affirment-ils.
La valorisation de la filière, largement débattue dernièrement lors des premières assises des métiers de la salle, se poursuit pour eux à travers la création de l'association Ô Service des talents de demain présidée par Denis Courtiade (Plaza Athénée à Paris). Un rassemblement de professionnels pour échanger sur le métier et ses évolutions et surtout sensibiliser et valoriser la filière directement auprès des jeunes des écoles hôtelières. "Il s'agit de redonner du sens à notre profession en montrant comment faire", concluait Olivier Novelli, membre fondateur.
Publié par Anne SALLÉ