“On ne peut pas combattre le départ des salariés souhaitant avoir une vraie vie de famille et sociale. Les horaires resteront toujours spécifiques dans notre secteur. Mais on peut agir sur l’organisation du temps de travail”, résume Clément Marot, ancien chef propriétaire du restaurant éponyme à Lille (Nord), repris par son fils et son neveu. Clément Marot a été l’un des premiers à mettre en place les pointeuses, essentielles pour vérifier “à la fin du mois le total exact des heures travaillées, afin de les payer ou les récupérer”. Autre innovation, à l’époque : “Je voulais avoir une vie de famille, j’ai donc décidé de ne plus fournir de repas à nos employés le soir. Ceux sans enfants venaient pour 19 heures, et les autres pour 20 heures. Les salariés appréciaient cette coupure plus longue et arrivaient dans un autre état d’esprit”, se souvient-il. D’autres restaurateurs tiennent, eux, à ce temps de partage avant le coup de feu : et pourquoi ne pas laisser le choix aux employés ?
Organiser les horaires : “être gagnant-gagnant”
Certains salariés de Michel Santos, qui a créé et ouvert l’été dernier le Bistrot Guinguette à Rodez (Aveyron), ne travaillent qu’un soir par semaine, dans cet établissement ouvert 6 jours sur 7. “C’est une demande de leur part pour voir grandir leurs enfants. J’ouvre quatre soirs par semaine. Certains travaillent sur une amplitude 9 heures-15 heures pendant quatre jours, puis une journée avec coupure et ne travaillent pas le week-end, et on organise un roulement. Ceux sans enfants se disent moins gênés par les coupures, mais ce doit être gagnant-gagnant pour tous”, souligne le dirigeant, qui emploie 12 salariés. Il estime que les contreparties positives du métier sont peu mises en avant, comme le fait de pouvoir être libre en semaine pour des rendez-vous administratifs ou autres. “Je ferme le dimanche pour que tous bénéficient de cette journée, et nous nous organisons pour qu’ils aient deux jours de congés consécutifs. Je m’adapte aussi au fonctionnement des nouvelles générations. S’ils ont besoin d’un week-end de quatre jours, ils sont prêts à travailler une semaine complète. Je les laisse gérer leur emploi du temps, mais en précisant que j’ai besoin de tant de personnes sur tel horaire”, détaille Michel Santos, qui est aussi président de l’Umih de l’Aveyron. Son homologue d’Eure-et-Loir, Rudy Carnis, a choisi de n’ouvrir que deux soirs par semaine son restaurant le Bergerac, à Morancez, et de fermer lundi et mardi, soit deux jours consécutifs pour tous. “Les tensions retombent plus en deux jours, l’esprit d’équipe est meilleur”, constate-t-il. Ce patron a également mis en place 7 semaines de congés payés, et paie toutes les heures supplémentaires.
Apporter du confort dans le travail
“Les salariés aiment avoir un jour de congé dans la semaine. Souvent, nous fermions le dimanche, mais c’est important d’essayer de satisfaire le jour de congé préféré, et surtout de ne pas rappeler la personne si jamais quelqu’un manque – à moins que le salarié ne le propose lui-même. Il vaut mieux prendre un extra, car on ne doit pas bousculer la vie de nos collaborateurs”, souligne Clément Marot. Pour lui, il faut aussi faire appel à un extra quand la surcharge de travail est trop importante - car “quand on est débordé, on devient mauvais dans son travail”. Benjamin Bergès, gérant de la brasserie le Coq de la place à Rodez, a même recruté plus de personnes que nécessaire “dans le but de mettre tout le monde dans le confort. Nous pouvons ainsi former une équipe du soir et une équipe du matin. C’est moins de coupures, et plus de week-ends. Nous fonctionnons avec un planning à la quinzaine : selon qui a besoin de quoi, on s’arrange entre nous”. Pour plus de confort aussi, Michel Santos sous-traite depuis sept ans le ménage : “Les employés n’aiment pas ces tâches, ne les font pas forcément bien et cela occasionnait des heures supplémentaires. Sous-traiter me coûte plus cher, mais libère du temps pour d’autres tâches…ou pour une pause !”, conclut-il.
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Publié par Laetitia Bonnet Mundschau