Il arrive parfois que l’on tombe en arrêt devant un beau bâtiment d’époque, que la désaffectation n’a pas privé de son cachet. L’envie peut naître alors de reprendre les lieux, pour en faire un hôtel ou un restaurant. Alors, vraie ou fausse bonne idée ? Techniquement, comment s’en sort-on ? Peut-on vraiment faire du neuf dans de l’ancien ? De l’avis de Philippe Prost, à qui l’on doit notamment la rénovation de la Monnaie de Paris, cela dépend de plusieurs facteurs.
Pour commencer, “la manière dont un bâtiment historique est inséré dans une ville est une considération essentielle à prendre en compte”, notamment en raison de la logistique liée à la mise en place du chantier. De fait, si le bâtiment se situe en plein centre-ville, cela engendre une complexité supplémentaire pour acheminer matériaux et grues. Pour autant, il ne s’agit pas de renoncer aux rénovations en ville ; “en général, on y trouve des bâtiments historiques magnifiques”, précise Philippe Prost.
Autre considération majeure à prendre en compte avant de se lancer, le contexte historique complet du bâtiment convoité. « Chaque rénovation devant obtenir l’aval de la Direction régionale des affaires culturelles, il faut bien avoir en tête que plus il y a de strates historiques à un bâtiment, plus le processus de rénovation et de validation sera long”, explique l’architecte. De plus, “la question se pose de savoir si l’on conserve ou non toutes ces strates architecturales ; et surtout, si elles peuvent se rendre compatibles avec un programme hôtelier ou de restauration.”
Adéquation du bâtiment avec les besoins d’un hôtel-restaurant
Pour pouvoir établir la faisabilité de la transformation du bâtiment en hôtel, il faut donc lancer une étude historique du bâtiment, afin de déterminer : la présence de parties anciennes susceptibles d’empêcher l’affectation projetée du bâtiment ; la capacité d’accueil effective de la structure et des planchers (sont-ils en mesure de supporter un programme hôtelier ?) ; comment les renforcer, si leur valeur patrimoniale requiert de les conserver...
Il faut ensuite évaluer l’adéquation entre la taille des pièces, avec les besoins d’un hôtel ; peut-on faire de ces pièces des chambres, et si oui, de quel standard ? Peut-on convertir les entresols en locaux techniques ? Pour évaluer tout cela, il importe de s’appuyer sur une équipe pluridisciplinaire, notamment composée d’un architecte patrimonial et d’un économiste du bâtiment (qui chiffrera le tout).
La partie cuisine représente elle aussi un élément essentiel à considérer avant de se lancer. Elle requiert en effet des contraintes très particulières, telles que la mise en place d’une marche en avant, l’installation de chambres froides et de locaux techniques, l’espace cuisine en tant que tel, les vestiaires et toilettes des équipes, le local poubelles (à climatiser parfois), etc. Il faut donc vérifier que le bâtiment existant comporte suffisamment d’espace pour pouvoir accueillir un restaurant potentiel (ici, entre 150 et 200 m2.)
Vérifier la situation juridique du bien
Enfin, le fait de changer l’affectation d’un bâtiment nécessite un permis de construire spécifique (et pas seulement une demande d’autorisation de travaux sur un monument historique). Il est donc très important de bien évaluer en amont la situation juridique du bien, ainsi que sa situation patrimoniale ; car selon les cas, les demandes d’autorisation à obtenir ne sont pas les mêmes – tandis que les délais d’obtention, eux, sont conséquents.
Côté budget, pensez aussi à “toujours prévoir un budget pour les aléas ; car on découvre au fur et à mesure de nouvelles choses à faire (et donc de nouveaux frais) ; comme le fait de désamianter, par exemple. Prévoyez donc environ entre 15 à 20 % du budget en plus.”
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Publié par Anastasia CHELINI
jeudi 25 juin 2020