L'Hôtellerie Restauration : Comment la présentation de votre nouvelle stratégie a-t-elle été perçue, en interne et par vos partenaires ?
Sébastien Bazin : Le 27 novembre dernier, jour de 'l'Investor Day' [jour où il a présenté sa nouvelle stratégie, NDLR], nous avons surpris tout le monde, y compris les marchés financiers. D'abord négativement, mais depuis, ils ont repris confiance et compris la stratégie au regard de l'élévation du cours de bourse à ce jour. Au niveau de l'opérationnel, j'ai rencontré des équipes qui avaient une envie féroce d'avancer et qui souhaitaient avoir une meilleure compréhension de la stratégie. Pour ce qui concerne l'encadrement, trois journées leur ont été consacrées, afin de leur présenter la nouvelle ambition d'Accor et la nouvelle organisation pour la soutenir. En proposant une organisation plus simple, nous clarifions les rôles et responsabilités de chacun et contribuons à donner au groupe plus de sérénité.
Vos partenaires franchisés attendent beaucoup de cette nouvelle organisation. Ils peuvent comprendre dans votre discours que la franchise n'est plus aussi pertinente pour le groupe. Quel message leur donnez-vous ?
Les franchisés sont et seront toujours nos interlocuteurs privilégiés. Ils représentent une vraie force pour le groupe. Nous leur avons dit que notre rôle en tant que franchiseur est de nous assurer de la force de distribution et d'innovation, et que nous avions pour mission de définir une identité, de donner de la cohérence et de développer les canaux de distribution. C'est la responsabilité unique du franchiseur.
La création d'HotelInvest pourrait toutefois être ressentie comme une pierre dans leur jardin en ne leur donnant plus la priorité lors des cessions de murs des hôtels. Cela veut-il dire qu'ils vont devoir perdre leurs avantages à partir de maintenant ?
En créant HotelInvest et HotelServices, Accor a dissocié deux métiers différents au sein du groupe. Le rôle d'HotelInvest est d'être un très bon expert immobilier, au même titre que Host ou Foncière des murs, pour ne citer que ceux-là. Nous allons donner une méthodologie et des outils à cette structure pour qu'elle puisse être la plus performante. Dans les années passées, les franchisés étaient en quelque sorte le réservoir immobilier d'Accor. Bien sûr, nous continuerons de vendre aux franchisés, mais nous nous donnons aussi le droit de garder les actifs qui nous semblent stratégiques. Toutefois, si un franchisé se positionne en tant qu'investisseur sur un territoire, nous ne lui ferons bien évidemment pas concurrence. Pour les franchisés, cela pourra signifier un volume moins important d'opportunités d'acquisition ; en revanche, le point positif c'est qu'Accor montre désormais l'exemple en étant un franchisé à part entière avec HotelInvest, porteur d'exigences de performance, comme ils le sont. Nous allons donc parler le même langage.
Certaines chaînes américaines avaient déjà créé ce type de structures, à l'exemple de Marriott avec Host, et les ont revendues après quelques années. Est-ce votre objectif ?
Il n'est pas question de revendre HotelInvest, qui est appelé à grandir en devenant un vrai métier pour le groupe, mieux identifié. La nomination prochaine du futur directeur - qui devra avoir eu une expérience similaire dans une activité connexe - est primordiale pour le groupe.
Certains pensent qu'avec HotelServices, vous allez n'être qu'un pourvoyeur de services. Est-ce l'objectif du groupe ?
Nous allons apporter des solutions au travers d'HotelServices pour que les entreprises deviennent plus performantes, et proposer aux franchisés ces outils nouveaux. À titre d'exemple, le Smart Pricing que nous avons lancé en juin pour la marque Ibis a été proposée aux franchisés qu'ils l'ont acheté avec enthousiasme. Les contrats de franchise resteront toutefois simples et clairs, même s'ils comportent plusieurs types de redevances.
En termes de développement, vous dites qu'Accor n'a pas vocation à être le plus grand hôtelier au monde. À quelle place positionnez-vous le groupe Accor dans le monde ?
Nous sommes déjà leaders en Europe et quasiment leaders dans le monde, à l'exception des États-Unis. Ce que je souhaite, ce n'est pas d'être le plus grand au monde mais de renforcer nos parts de marché sur les territoires où nous sommes déjà leaders avec des marques solides, et où nous avons sur place les moyens humains et financiers. Il faut accepter de ne pas être sur tous les marchés avec toutes nos marques. En termes de développement, je crois qu'Accor a une carte à jouer dans les pays émergents, notamment en Afrique, mais aussi dans les pays matures. Par ailleurs, et j'insiste, les franchisés doivent être convaincus qu'ils sont nos partenaires privilégiés et qu'ils le resteront.
Publié par Propos recueillis par X. S.