À bord d'un sous-marin nucléaire d'attaque, ils sont quatre marins dédiés à la réalisation et au service des repas pour un équipage de 80 personnes. Dans un espace très restreint et dans des conditions de missions opérationnelles, leur métier demande une organisation très spécifique. La mission peut durer jusqu'à quatre mois. "Nourrir 80 personnes du petit déjeuner au dîner pendant quatre mois non-stop, sans jour de repos, ce sont des conditions pas évidentes !", commente Damien Appriou, commandant de l'équipage 'rouge' de L'Améthyste.
Le cuisinier dispose d'un matériel limité, faute de place, et d'une cuisine réduite mais efficace dans un espace de 3 m2, alors que l'office du maître d'hôtel n'excède pas 2 m2. "À bord, le repas est le seul moment de détente et de convivialité, où tout le monde est ensemble. C'est un moment pour créer du lien, ce qui est primordial pour la cohésion de l'équipage", rappelle le commandant. Si certains s'engagent à la suite d'une formation en école hôtelière, comme le cuisinier, Ludovic Chilini, titulaire d'un BEP traiteur, la plupart arrivent très jeunes dans les sous-marins. "S'ils s'adaptent à la vie du sous-marin, on les fait évoluer par la formation interne. Soit ils arrivent avec leur formation, soit ils gravissent les échelons, mais il faut faire ses preuves, le métier est exigeant", précise le commandant.
_________________________________________________________
Yohann Le Berre, quartier maître, maître d'hôtel, 27 ans
Le maître d'hôtel est chargé à bord du service du commandant et des officiers, du nettoyage de leurs chambres et des parties communes. "Il faut être disponible tout le temps. Le métier demande organisation. Avec un office de 2 m2, c'est du système D tout le temps! Notre travail c'est d'améliorer le quotidien, par exemple, faire des crêpes au goûter, ça fait plaisir à tout le monde."
Éric Croustillas, matelot, garçon, 23 ans
Le garçon s'occupe de la plonge et de la gestion des déchets, un élément primordial à bord. "On est les premiers levés, à 5 h 45 tous les jours. Je dois préparer les petits déjeuners, puis aider le cuisinier. Ensuite, pendant les deux services du midi et du soir, je fais la plonge. Avec l'espace restreint, il faut être organisé et ne pas utiliser trop d'eau. Le plus dur, c'est la gestion des déchets, on a pas le droit à l'erreur."
Arnaud Bozonnet, second maître, commis, 39 ans
À terre, le commis est chargé de la logistique des vivres pour la mission. À bord, il seconde le cuisinier. "Il faut gérer les vivres en fonction du budget, des besoins du cuisinier mais aussi de la place disponible à bord. On part avec 45 jours de vivres, soit 4 tonnes de nourriture, avec un ravitaillement en milieu de mission. On emmène des conserves, des surgelés, de l'épicerie sèche, mais aussi du frais qui, s'il est rangé au bon endroit, peut tenir longtemps. En mission, je me lève tous les jours à 3 h 30 pour faire le pain puis j'aide le cuisinier : on se met d'accord sur le menu, je lui sors tout ce dont il a besoin et je prépare les entrées. On s'organise pour se répartir le petit espace de la cuisine, c'est un vrai travail en duo."
Ludovic Chilini, second maître, cuisinier, 33 ans
Seul cuisinier à bord, il prépare chaque jour le déjeuner et le dîner de 80 marins. "On compose les menus en répartissant sur la semaine les viandes, les poissons, les légumes et les féculents. Le soir, on fait des menus plus légers. Les jeudis et les dimanches, les repas sont améliorés, le mercredi soir, on propose une animation qui fait plaisir : soirée pizzas ou kebab. Il y a aussi des menus que l'équipage n'aime pas trop, alors on améliore les entrées et le dessert pour compenser. Il faut prendre en compte ceux qui ne mangent pas de porc et faire aussi en fonction des goûts. C'est difficile de satisfaire tout le monde, mais on est là pour faire plaisir, pour sortir l'équipage de son contexte de travail. À terre, je regarde Top Chef pour trouver des idées ou je cherche sur internet des recettes. Tout n'est pas réalisable, mais on s'adapte."
Publié par Marie TABACCHI