L’amphithéâtre du lycée Jean Drouant, à Paris (XVIIe), affichait complet. Durant la matinée du 16 janvier dernier, hôteliers, restaurateurs, représentants du monde associatif et experts de l’hospitalité se sont réunis pour débattre de l’accueil des personnes en situation de handicap. Un temps d’échanges et de retours d’expérience organisé par Freddy Zerbib, fondateur de l’association Speak You, instigatrice d’un menu vocal à destination des malvoyants. D’emblée, l’éditorialiste Caroline Pilastre, elle-même déficiente visuelle, a reconnu que les Jeux paralympiques de Paris 2024 ont offert “un éclairage fantastique sur le handicap”, mais au quotidien, a-t-elle poursuivi, “c’est une autre histoire”. En particulier lorsqu’il s’agit de prendre un repas au restaurant. Avis partagé par Bernard Boutboul, président du cabinet Gira. “Le secteur de la restauration est en retard sur l’accueil des personnes en situation de handicap. Certes les normes PMR existent, mais dans certains établissements trop petits, trop étroits ou dépourvus d’ascenseur, l’accès reste une problématique”, a-t-il expliqué.
Pour Sylvain Nivard, aveugle et président de l’association Valentin Haüy, la généralisation des terminaux de paiement tactiles, par exemple, le contraint à donner son code de carte de crédit à un restaurateur ou à un hôtelier. Quant à se repérer sur une terrasse ou se déplacer dans un établissement en plein coup de feu, “sans l’aide d’un serveur, c’est difficile”. “D’où la présence d’une balise sonore à l’entrée du Pullman Paris Bercy”, a souligné Christian Pensart. À la tête de la Mission Handicap chez Accor, il a également fait état de quelque 400 hôtels du groupe en cours de labellisation Tourisme et Handicap.
“Il reste de la pédagogie à faire”
Débattre sur l’inclusion dans l’hospitalité, c’est aussi aborder le recrutement des personnes en situation de handicap. À ce titre, Christian Pensart a rappelé que, dans le cadre du programme Duo Days, le groupe Accor s’est associé à beYoureyeS pour accueillir des personnes malvoyantes et leur permettre de découvrir différents postes dans le secteur de l’hospitalité. “Chez Accor, notre politique d’inclusion vise à intégrer et accompagner les personnes en situation de handicap, mais aussi à aménager leur poste de travail”, a-t-il ajouté. Quant à “l’aspect business”, “il n’est pas tabou” pour le directeur de la Mission handicap du groupe Accor : “ Nous ne pouvons pas nous priver de 10 à 15 % de la population française comme clientèle potentielle.” Mais pour accueillir dans de bonnes conditions une personne à mobilité réduite, “il reste de la pédagogie à faire”, a nuancé Richard Ramos. Pour le député du Loiret, lui-même handicapé par une cheville artificielle, il y a urgence à “poser un regard sur les plus faibles et construire des lois pour mieux vivre ensemble”.
Publié par Anne EVEILLARD