L'Hôtellerie Restauration : Qu'est-ce que signifie 'l'agilité' dans une entreprise ?
Bernard
Michaud : Rappelons, tout d'abord, que le mot 'agilité' vient
du latin "agilis", dérivé du verbe "agere", qui signifie
agir. Autrement dit, l'agilité revient à faire preuve d'une certaine souplesse
dans la manière d'exercer son métier. Concernant le secteur de l'hôtellerie-restauration,
cette agilité est multidimensionnelle. Car un hôtelier ou un restaurateur doit avoir
des compétences aussi bien en management qu'en marketing, droit du travail,
gestion, hygiène… Être agile, c'est savoir créer un mouvement d'adhésion aussi
bien avec des salariés qu'avec un banquier ou un architecte.
À quels niveaux de la gestion d'un établissement, agilité et habileté
doivent-elles être les plus présentes ?
Agilités et habiletés doivent avant tout se déployer dans le
domaine de la communication interpersonnelle : la capacité à argumenter et créer une adhésion autour de valeurs, projets
et objectifs. La prise de parole en entreprise devient une compétence
clé, indispensable. On doit voir et percevoir la parole du responsable. Car la plus grande agilité est celle qui
consiste à créer une vision pour son entreprise. Cette prise de parole du patron, du chef, est à la base de toute
coopération, bien plus que la collaboration ou la coordination.
L'agilité est-elle un recours face à une situation de crise ?
Oui, les
habiletés les plus significatives se déploient aussi dans les situations
complexes. C'est le cas, par exemple, lorsqu'un chef de réception gère un overbooking et parvient à loger tous ses clients avec
savoir-dire, tact et élégance. Un hôtelier comme un restaurateur doit 'être à son
affaire', tout voir et tout savoir sur son entreprise, ses rouages, son
fonctionnement, ses faiblesses comme ses points forts. L'observation est une
qualité majeure quant à l'agilité. C'est parce qu'il connaît les lois, règlements,
principes et obligations, possibilités et impossibilités,
que l'hôtelier ou le restaurateur
fait 'ce qu'il doit faire'. À contrario, le manque d'agilité trouverait
sa source dans un manque de connaissance de sa propre entreprise et de son
environnement.
Agilité et marketing sont-ils liés ?
Oui, ils le
sont étroitement. L'agilité est surtout au service du commerce, du business,
dans l'art de vendre et de faire des affaires. Aujourd'hui, on doit dépasser la
notion d'offre de service, car nous sommes dans une période de création de valeur pour le
client. L'agilité se situe justement là. Le courant expérientiel insiste sur les émotions ressenties
par le client et il s'agit de savoir vendre des émotions futures
ressenties. Or de nombreux hôtels fonctionnent encore avec l'idée que le produit est bon. Cette impression est une
orientation produit et non une orientation client. Si on se situe du côté du
client, il ne s'agit pas de parler du produit, mais des bienfaits ressentis au
regard de l'expérience
à vivre. La souplesse
commerciale, c'est aussi la force d'innover. C'est d'ailleurs l'agilité la plus
difficile, car il s'agit
de contrarier l'expression de la demande.
Enfin, en terme de résultat, à quoi peut-on s'attendre ?
L'agilité,
c'est le résultat de l'analyse que l'on effectue sur son entreprise à travers
le temps passé, le temps présent et le temps futur. Être dans l'incapacité d'analyser les erreurs passées,
de comprendre ce qui se produit dans le temps présent sans un souci
d'anticipation, alors, l'agilité se transforme en handicap… C'est une valse à
trois temps qui demande souplesse, prise de recul, flexibilité et réactivité.
jeudi 17 août 2017