L'Hôtellerie Restauration : En cas d'embauche d'un salarié étranger membre de l'Union Européenne, la présentation d'un titre de séjour est-elle requise ?
Sylvain Saligari : Non. Les étrangers membres de l'union européenne ou assimilés, dont les Roumains et Bulgares depuis le 1er janvier 2014, ne sont pas tenus de détenir un titre de séjour pour exercer une activité professionnelle en France, en vertu des articles L121-1 et L121-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Les formalités d'embauche sont donc identiques à celles exigées pour un salarié français. Seule exception pour les ressortissants croates qui sont encore soumis à l'obligation de détenir un titre de séjour pour travailler en France, sauf s'ils sont titulaires d'un diplôme au moins équivalent au master obtenu en France. Dans ce cas, ils peuvent travailler en France sans titre de séjour ni autorisation de travail.
La présentation d'un titre de séjour concerne donc uniquement les autres salariés, c'est-à-dire pour l'essentiel ceux qui sont ressortissant d'un pays non membre de l'Union Européenne. Quelle est la nature du titre qu'un tel candidat doit présenter ?
L'employeur doit demander au futur salarié de produire un titre de séjour l'autorisant à travailler. Cela peut être un visa de long séjour valant titre de séjour (VLS-VTS), une carte de séjour, une autorisation provisoire de travail, carte de résident ou de résident de longue durée-CE, d'une carte de séjour temporaire vie privée et familiale ou d'une carte de séjour étudiant, qui l'autorise à travailler dans la limite de 60 % de la durée annuelle du travail. C'est uniquement si l'étranger lui présente un titre de séjour l'autorisant à travailler que l'employeur peut l'engager. S'il en possède un, il doit, en outre, vérifier l'authenticité du document en vertu de l'article L5221-8 du Code du travail. Pour cela, il adresse la copie du document produit par l'étranger par lettre recommandée avec avis de réception datée et signée ou un email, au préfet du département du lieu d'embauche. À Paris, il faut l'envoyer au préfet de police. À la demande du préfet, il peut être exigé la production par l'étranger du document original. Cette demande doit être faite au moins deux jours ouvrables avant la date d'effet de l'embauche. Le préfet notifie sa réponse par courrier, télécopie ou email, dans un délai de deux jours ouvrables à compter de la réception de la demande. À défaut de réponse dans ce délai, l'obligation de l'employeur de s'assurer de l'existence de l'autorisation de travail est réputée accomplie selon l'article R5221-41, R5221-42 du code du travail.
Si le titre de séjour présenté par le candidat ne l'autorise pas à travailler, que faire ?
L'employeur ne peut pas légalement embaucher un étranger si son titre de séjour ne l'autorise pas à travailler. Par exemple si l'étranger n'a qu'un titre de séjour visiteur. Avant de l'embaucher l'employeur doit donc l'inviter à engager une procédure de changement de statut. Il ne peut pas le faire à sa place, mais un contrat de travail ou une promesse d'embauche peut aider à soutenir sa demande. Cela va dépendre de la procédure entamée par le salarié, procédure qui, va elle même dépendre de sa situation personnelle et familiale, du pays dont il est originaire car il existe des accords bilatéraux, mais aussi du titre de séjour dont il est titulaire au moment où fait sa demande de changement de statut.
Embaucher un travailleur étranger coûte-t-il plus cher ?
L'embauche d'un salarié étranger ne coûte pas plus cher mis à part les frais occasionnés par le paiement de la taxe due à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) pour l'embauche d'un étranger non muni d'une autorisation de travail. Le montant de la taxe équivaut à 55 % mensuel brut dans la limite de 2,5 SMIC. Cette taxe est à la charge exclusive de l'employeur qui ne peut en demander le remboursement à son salarié.
L'embauche d'un salarié étranger prend-elle plus de temps ?
En effet, les demandes d'autorisation de travail adressées à la DIRECCTE peuvent être traitées avec un délai de plusieurs mois. Cela varie en fonction des départements. Toutefois, l'embauche d'un étranger déjà muni d'une autorisation de travail ne prend pas plus de temps que celle d'un salarié français.
Le salaire d'un salarié étranger peut-il être moins élevé que celui d'un salarié français ?
Les salariés étrangers dès lors qu'ils sont en situation régulière, doivent, sans discrimination, bénéficier des mêmes droits que les salariés français en application de l'article L1132-1 du code du travail. À travail égal, le salaire d'un étranger doit être le même que celui d'un ressortissant français.
Que risque un employeur qui embauche sans autorisation de travail ?
L'article 8256-2 du Code du travail dispose que "Le fait pour toute personne, directement ou par personne interposée, d'embaucher, de conserver à son service ou d'employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France, en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1, est puni d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 15 000 euros. Ces peines sont portées à un emprisonnement de dix ans et une amende de 100 000 euros lorsque l'infraction est commise en bande organisée. L'amende est appliquée autant de fois qu'il y a d'étrangers concernés". Cependant, même si la loi prévoit des sanctions à l'encontre des employeurs qui embaucheraient des salariés en situation irrégulière, nous avons pu constater que ceux qui soutenaient la démarche de régularisation de leur salarié sans papier dans le cadre de la circulaire de Monsieur Manuel Valls en date du 28 novembre 2012 n'étaient pas poursuivis.
Par exemple, lorsque des employeurs soutiennent les démarches de régularisation de leurs salariés sans titre de séjour auprès de la préfecture, force est de constater que le préfet ne transmet pas au Procureur de la République le nom des employeurs qui seraient susceptibles d'être poursuivis sur le fondement de l'article 8256-2 du Code du travail.
La circulaire en date du 28 novembre 2012 du Ministre de l'Intérieur prévoit d'ailleurs qu'un étranger puisse présenter au soutien de sa demande de régularisation des fiches de paie établies par son employeur alors qu'il ne disposait pour cette période d'aucun titre de séjour l'y autorisant. Les fiches de paie peuvent même être établies de manière rétroactive, ce qui implique une régularisation des charges.
Comment savoir si l'étranger est titulaire d'un titre l'autorisant à travailler ?
Pour pouvoir travailler en France, un étranger doit y avoir été autorisé par l'administration française. Cette autorisation prend la forme d'un visa de long séjour valant titre de séjour ou une carte de séjour ou une autorisation provisoire de travail. Le candidat à l'emploi doit donc vous fournir l'un de ces documents ci-dessus mentionnés. Toutefois, certains étrangers sont dispensés de l'autorisation de travail tels que :
- travailleur européen ou suisse, excepté le travailleur croate ;
- ressortissant de Monaco, Andorre et San Marin ;
- bénéficiaire d'une carte de résident ou de résident de longue durée-CE ou d'une carte de séjour temporaire vie privée et familiale ou d'une carte de séjour étudiant (dans la limite de 60 % de la durée annuelle du travail) ;
- bénéficiaire d'un visa de long séjour valant titre de séjour (VLS-TS) mentions étudiant, scientifique-chercheur, conjoint de Français ou conjoint entré par regroupement familial, pendant la durée de validité du visa.
L'employeur a-t-il l'obligation de vérifier que le titre de séjour présenté est authentique ?
L'employeur doit adresser la copie du document produit par l'étranger par lettre RAR datée et signée ou un email, au préfet du département du lieu d'embauche. À Paris, au préfet de police. À la demande du préfet, il peut être exigé la production par l'étranger du document original. Cette demande doit être faite au moins deux jours ouvrables avant la date d'effet de l'embauche. Le préfet notifie sa réponse par courrier, télécopie ou email, dans un délai de deux jours ouvrables à compter de la réception de la demande. À défaut de réponse dans ce délai, l'obligation de l'employeur de s'assurer de l'existence de l'autorisation de travail est réputée accomplie selon les articles R5221-41 et R5221-42 du code du travail. Une copie du titre valant autorisation de travail doit être annexée au registre unique du personnel.
Doit-il vérifier la régularité de la situation du travailleur étranger après l'embauche ?
Oui, l'employeur doit s'assurer à la date d'expiration du titre de séjour de son salarié de son renouvellement par l'administration française.
Publié par Propos recueillis par Tiphaine Beausseron, Auteur du Blog des Experts
lundi 26 mai 2014