L'Hôtellerie Restauration : Comment se porte le marché de ventes de
fonds de commerce CHR dans votre secteur géographique ?
Bernard Baduel : Dans l'Essonne, qui est notre
secteur géographique principal, l'offre de vente est nettement supérieure à la
demande sur le segment de la restauration et des bars-brasseries et nous
peinons à trouver des acquéreurs pour ces affaires. En revanche, nous trouvons
plus aisément des acquéreurs pour les bar-tabacs ou tabacs purs. Ainsi, notre
ratio affaires prises en mandat/affaires vendues est très favorable au segment
bar-tabacs. Le segment restauration, lui, souffre d'une image plutôt négative
attachée au secteur qui rime avec une réglementation qui ne cesse de se
complexifier, beaucoup d'heures de travail, des difficultés à trouver du
personnel pour une rentabilité incertaine ou en baisse, de lourdes charges
sociales... Nous disposons en portefeuille de fonds de commerce de restauration
en franchise dont les propriétaires souhaitent vendre non pas pour s'agrandir,
réaliser un profit ou partir en retraite, mais parce qu'ils ne s'en sortent
pas. Autre indicateur de la difficulté de la restauration : même les
affaires en liquidation judiciaire trouvent difficilement preneur alors qu'elles
sont vendues à bas prix en raison de leurs difficultés.
Les prix de cession en pâtissent-ils ?
Oui, hormis les affaires situées dans quelques pôles d'activité dynamiques
- comme par exemple les secteurs de la Croix blanche -, les prix de cession souffrent
puisqu'ils sont étroitement liés aux chiffres d'affaires et aux résultats.
Ainsi, un bar-brasserie se vend aujourd'hui aux alentours de trois fois
le Perf et 90 % du chiffre d'affaires (CA) HT, contre 120 % en 2014.
S'agissant de la restauration traditionnelle sans licence IV, le prix moyen est
plutôt de 60 à 80 % du CA HT - contre 90-100 % en 2014. On tombe à
40-50 % pour le gastronomique, contre 50-60% en 2014.
Quels sont les ratios clés qui comptent dans l'évaluation du fonds de
commerce ?
Le ratio déterminant est le loyer car c'est une charge constante dont l'acquéreur
ne peut se défaire. Un loyer représentant 8 % ou moins du CA est idéal. S'il
est compris entre 8 et 12 %, c'est encore positif. Au-delà, c'est risqué
et nous aurons du mal à trouver un repreneur, même si le prix de cession est
raisonnable et que les autres indicateurs sont positifs. Les ratios de la masse
salariale et des matières premières sont également importants dans le processus
d'évaluation, mais légèrement moins car l'acquéreur peut agir pour les diminuer
selon son projet et ses capacités de gestionnaire.
Quels sont les délais de vente ?
En moyenne, il faut compter quatre à cinq mois minimum entre l'offre d'achat
et la signature définitive. Ce délai s'explique par une réglementation de plus
en plus riche - permis d'exploitation, stage hygiène, normes de sécurité, baux
commerciaux. Cela force notre métier de conseiller spécialisé à évoluer. L'agent
immobilier n'est plus seulement un intermédiaire, il doit construire un dossier
complet en analysant les incidences juridiques, fiscales et financières de la
vente. Ensuite, il filtre les acquéreurs en fonction de leur profil et leur capacité
financière, conseille et accompagne le repreneur jusqu'à la remise des clés. C'est
ce qui fait notre force, et amène une valeur ajoutée en comparaison d'une vente
entre particuliers.
Publié par Tiphaine BEAUSSERON