René Colomban, gérant de la plage Blue Beach à Nice, et ses employés ont vécu une
nuit d'horreur le 14 juillet. La plage, située en contrebas de la Promenade des
Anglais, sur le passage du camion meurtrier, a servi de refuge dans un grand
moment de confusion et de panique.
Alors que tout le quartier a été fermé et interdit d'accès, le 15
juillet au matin, René Colomban revient pour relever son veilleur de nuit. "La
plage était fermée, j'ai passé la journée seul à garder l'établissement. Le
plus étrange, c'est qu'il n'y avait aucun bruit. Tout le quartier était bouclé
pour l'enquête." Le 16 juillet, René Colomban a rouvert sa plage avec l'autorisation de
la préfecture. "La chaussée nord de la promenade était ouverte à la
circulation, la partie sud fermée, recouverte de fleurs et de bougies. On avait
l'impression de traverser un cimetière pour descendre sur la plage, c'était
surréaliste. Mais il fallait reprendre le travail, ça occupe l'esprit et évite
de ruminer."
Une équipe en état de choc
Pour autant, tous ses employés n'étaient pas en état de revenir à la
plage tout de suite. "Cinq ou six d'entre eux sont vraiment choqués. Au-delà
des scènes de panique qu'on a vécu, c'est surtout la vision des corps et des
blessés sur la promenade qui les a marqués. Je les ai mis au repos et envoyés
vers la cellule psychologique, ça leur a fait du bien d'en parler."
Hasard du calendrier, samedi soir, le Blue Beach accueillait un mariage,
prévu de longue date. "C'est difficile d'annuler, un mariage c'est une
longue préparation pour la famille. J'ai expliqué aux mariés qu'on ne pourrait
pas mettre de musique, qu'on assurerait la prestation mais qu'il était hors de
question de faire une grosse fête. Ils ont compris bien sûr. Cela a été très
dur d'assurer ce service."
Une semaine après le tragique événement, tous les employés ont repris le
travail. Bien que la plage retrouve un peu de fréquentation, l'ambiance dans la
ville reste lourde. "On n'entend pas les cris d'enfants sur la plage comme d'habitude,
tout semble plus calme, l'ambiance est pesante", commente René Colomban.
Les clients sont compatissants. "On a reçu des messages de soutien du monde
entier, les clients sont gentils, c'est très réconfortant. La fréquentation va
être plus calme pendant quelques jours, c'est normal et ce n'est pas le plus
grave. Mais la vie va et doit reprendre son cours. Dans tous les cas, je
garderai l'ensemble de mon personnel. Je les ai rassurés sur ce point, c'est un
devoir et un engagement que je tiendrai. En travaillant, on s'occupe l'esprit,
c'est comme ça que ça ira mieux", espère-t-il.
Publié par Marie TABACCHI