L'Hôtellerie Restauration : Avec la crise qui économique qui s'éternise, l'accès au crédit professionnel s'avère de plus en plus compliqué. Cela a-t-il modifié le profil des acheteurs potentiels ?
José Tena : Incontestablement. Nous constatons d'une part que de plus en plus de repreneurs recherchent des petites affaires du type 25-30 couverts à midi, 10 couverts le soir, vendues aux alentours de 60 000 €, qu'ils peuvent exploiter en couple sans être obligés d'embaucher. Parfois, ils bénéficient d'un coup de main de leur famille pour la trésorerie de départ, mais pas toujours. Avec ce type de fonds, ils évitent le circuit des banques et se déchargent des difficultés financières, administratives et managériales liées à l'emploi de personnel.
Les exigences des banques nous a aussi conduit à modifier notre portefeuille de candidats acquéreurs. Nous sommes à notre tour, devenus particulièrement sélectifs car nous savons que s'ils ne remplissent pas les critères bancaires, la vente n'aboutira pas. Par exemple, pour une première installation en restauration, il faut désormais le plus souvent que le candidat à l'acquisition soit cuisinier, diplômé, doté d'une expérience professionnelle de huit à dix ans. S'il est serveur, il doit être associé à un cuisinier. La banque lui demandera au moins 40 % d'apport personnel. Cela réduit forcément la palette des candidats qui ont une chance d'aboutir.
Ressentez-vous également du changement du côté des vendeurs ?
Nous notons qu'ils sont plus enclins qu'avant au crédit vendeur pour accélérer le processus de vente. Par ailleurs, nous remarquons que les délais de remise sur le marché se font de plus en plus courts. Il n'est plus rare de voir des reventes de fonds à très court terme, c'est-à-dire quinze à dix-huit mois après leur acquisition. En général, ces propriétaires souhaitent se séparer rapidement de leur affaire qu'ils estiment trop dures à exploiter au quotidien. Ils réalisent qu'ils ne parviendront à rester rentables et tentent de la revendre vite en espérant faire un petit profit ou, au moins récupérer leur apport. Malheureusement, ils sont souvent déçus car les fonds surévalués ne se vendent pas. Ils restent sur le marché jusqu'à ce que le propriétaire accepte d'aligner leur prix à celui du marché.
Selon les chiffres de la Banque de France*, il y a une recrudescence des défaillances d'entreprise, en particulier dans le secteur des CHR. L'avez-vous ressenti dans votre secteur ?
Oui, notre portefeuille d'affaires à vendre comprend plus d'affaires en redressement judiciaire qu'auparavant. C'est un signe triste et flagrant du malaise économique national et notre région n'est pas épargnée. D'un autre côté, c'est aussi une opportunité pour des professionnels aguerris d'acquérir des affaires à un prix intéressant et parfois accessibles sans crédit professionnel.
Quels sont les fonds qui se vendent le mieux dans votre secteur ?
Les restaurants d'hyper centre-ville mais aussi les fonds de restauration simple ou rapide dans les zones périphériques commerciales ou de bureaux. Ces derniers séduisent car ils sont souvent fermés le week-end et le soir, ce qui permet d'allier métier et vie privée. Cet aspect est devenu très important chez les professionnels de la nouvelle génération.
Quels sont ceux qui se vendent le moins bien ?
Les bars-PMU et les hôtels-restaurants. Les premiers parce qu'ils ne correspondent au mode de vie moderne, les seconds parce que l'activité de restauration effraie les repreneurs.
Quelle est la tendance générale du marché pour 2015 ?
On sent que le marché reprend. Le premier semestre 2014 est meilleur en volume de transactions comparé à 2013. La crise a eu un effet positif : elle a fait prendre conscience aux vendeurs qu'ils devaient ajuster leur prix de cession à celui du marché. Elle a aussi conduit les acheteurs à moins s'endetter. Du coup, toutes les ventes avec demandes de crédits que nous avons eues depuis le début de l'année ont abouti, car si le crédit est obtenu, la transaction se réalise.
Prix moyens de vente pratiqués pour les CHR à Toulouse et sa région selon le cabinet Century 21 Alténa Transactions
Type de commerce |
Tranche de CA HT |
Prix de vente en % du CA HT |
Prix de vente en coef. EBE |
Tendance 2014-2015 |
Restauration rapide zone urbaine |
< 120 000 € |
70-80% |
x 3 |
ä |
> 120 000 € |
90-100 % |
x 3 ou x 4 |
ä | |
Restauration pure urbaine |
< 300 000 € |
70-80 % |
x 3 |
æ |
> 300 000 € |
60-90 % |
x 3 |
æ | |
Bars-brasseries |
130 000 -300 000 € |
100-120 % |
x 4 ou x 5 |
à |
Restauration simple en zone de bureaux |
< 300 000 € |
100 % |
x 3 ou x 4 |
ä |
> 300 000 € |
80 % |
x 3 ou x 4 |
ä | |
Restauration en centres commerciaux |
< 300 000 € |
90-100 % |
x 3 ou x 4 |
à |
> 300 000 € |
80 % |
x 3 ou x 4 |
à |
Publié par Propos recueillis par Tiphaine Beausseron