L'Hôtellerie Restauration : Serge Trigano, vous êtes parrain du prochain salon Equip'Hôtel qui se tiendra du 16 au 20 novembre 2014, une édition placée sous le signe de la décoration. Après l'aventure du Club Med, vous êtes à l'origine, avec votre comparse Philippe Starck et vos deux fils Benjamin et Jérémie, d'un nouveau concept hôtelier, le Mama Shelter, qui a bouleversé les codes de l'hôtellerie. Le concept, qui repose sur une décoration travaillée mais décalée, a été beaucoup admiré, parfois copié.
D'après vous, la décoration a-t-elle pris une place prépondérante dans l'hôtellerie ?
Serge Trigano : Dans le concept Mama Shelter, la décoration n'est pas le seul élément majeur. La réussite du Mama tient à plusieurs facteurs : une localisation atypique, un lieu de vie important, une partie prépondérate accordée à la restauration au bar, et en une décoration décoiffante, puisqu'elle a été confiée au décorateur peut-être le plus brillant de sa génération, Philippe Starck. C'est tout cet ensemble de facteurs qui a fait la réussite du Mama. La décoration en est l'un des éléments mais ce n'est pas le seul. Je dirais même que la réussite du concept tient d'abord aux hommes et aux femmes qui y travaillent. (…) Par ailleurs, quand on voit le nombre d'hôtels qui se rénovent, les boutique-hôtels, les hôtels design, il est difficile d'imaginer qu'on n'est pas dans une tendance de fond.
D'après vous, est-ce que trop de déco tue la déco ? Une décoration réussie justifie-t-elle des prix élevés ?
Certainement pas. Je dirais même que ce n'est pas parce qu'une déco est chère qu'elle est attirante. Je connais bon nombre d'hôtels qui sont tristes et qui ne marchent pas alors qu'ils possèdent une superbe déco. À part une certaine niche de clientèle très attirée par ce qui est uniquement esthétique, les gens ne recherchent pas aujourd'hui uniquement une belle déco. Ils veulent surtout être bien. Je pense que l'essentiel pour le client est d'avoir un bon lit, de bons draps, une lumière qui fonctionne. Surtout, il faut que tout soit simple, et que lorsque l'on appuie sur l'interrupteur, les lumières s'éteignent sans que l'on mette trois jours avant de comprendre comment ça fonctionne.
Entre votre premier Mama Shelter, à Paris, et le dernier, qui va ouvrir à Los Angeles, quelles ont été les évolutions ? Existe-t-il globalement des tendances majeures qui émergent ?
Depuis le premier Mama, il y a cinq ans, nous avons corrigé un certain nombre d'erreurs. Celui de la rue de Bagnolet, par exemple, était relativement sombre alors que les autres sont très clairs, et laissent entrer la lumière. Les jeux de couleurs ont changé. Mais nous avons gardé l'essentiel : la table d'hôte, un grand bar central, les bouées autour du bar, et ainsi de suite.
Quant aux tendances actuelles dans la déco hôtelière, je n'en vois pas. L'essentiel est de rester authentique. On voit aujourd'hui tous les styles, des styles répétitifs, des styles personnalisés, des styles design, d'autres plus authentiques. Tout est possible et tout est bien. Demain on assistera à l'ouverture du Peninsula, à la réouverture du Plaza Athénée chacun dans leur genre, très différent mais avec des décorateurs de talent et chacun sera extraordinaire. C'est cela pour moi, la véritable tendance : rester authentique et différent.
Publié par Propos recueillis par X. S.
lundi 10 mars 2014