Trois conditions cumulatives doivent être remplies pour respecter la notion de motif économique dans le cadre d'un licenciement :
- Vous n'avez rien à reprocher personnellement à votre salarié ;
- La rupture fait suite à une suppression ou transformation d'emploi ou une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques, des mutations technologiques, la réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ou la cessation d'activité de l'entreprise (la loi Travail a ajouté les deux derniers motifs et consacre ainsi la jurisprudence antérieure). Ces motifs doivent être réels et sérieux ;
- Vous êtes dans l'impossibilité de reclasser le salarié.
Pas de reproche personnel, mais une cause économique
La loi distingue quatre causes économiques susceptibles de justifier un licenciement.
- Les difficultés économiques
Ces difficultés économiques peuvent être caractérisées par :
- l'évolution significative d'au moins un indicateur économique (baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, pertes d'exploitation, dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation) ;
- soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.
L'article L 1233-3 du code du travail précise qu'une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l'année précédente, au moins égale à :
- 1 trimestre pour une entreprise de moins de 11 salariés ;
- 2 trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins 11 salariés et de moins de 50 salariés ;
- 3 trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins 50 salariés et de moins de 300 salariés ;
- 4 trimestres consécutifs pour une entreprise de 300 salariés et plus.
Ces difficultés s'apprécient au niveau de l'entreprise si elle n'appartient pas à un groupe (article L 1233-3 du code du travail modifié par l'ordonnance du 22.09.2017 art. 5 et 1).
- Les mutations technologiques
Il n'y a pas de définitions légales de mutations technologiques. En général il s'agit de progrès informatiques qui modifie les besoins de l'entreprise. Par exemple, un changement logiciel qui supprime la majeure partie des tâches jusque là exécutées par un salarié.
- Une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité
Il s'agit d'une réorganisation vitale pour l'entreprise. Par exemple, une réorganisation destinée à réaliser des profits supplémentaires ou à économiser des coûts salariaux (cass. soc. 22 février 2006, n° 04-40041 D - cass. soc. 21 décembre 2006, n° 05-42185 D) n'est pas suffisante. Il a également été jugée qu'une réorganisation destinée à mettre fin aux nuisances causées à l'environnement n'était pas justifiée (cass. soc. 13 février 2008, n° 06-44358 D). De même, licencier le cuisinier à l'occasion d'une cession de fonds de commerce parce que le repreneur souhaite endosser ce rôle n'est pas une cause économique réelle et sérieuse.
- La cessation complète d'activité de l'entreprise
Dans un récent arrêt, la Cour de Cassation a jugé qu'une fermeture d'établissement ne constitue pas une "cessation d'activité" au sens du licenciement économique. Dans cette affaire une société hôtelière s'était vue confier l'exploitation d'un hôtel situé dans l'enceinte d'un aéroport par la CCI. Vingt ans plus tard, dans le cadre d'une opération immobilière, la CCI avait informé la société hôtelière de l'arrêt de l'exploitation de l'hôtel en question. L'employeur avait en conséquence fermé l'établissement et engagé une procédure de licenciement économique, en invoquant une cessation d'activité. Mais la société qui avait fermé l'un de ses établissements, n'avait pas elle-même mis la clef sous la porte. Il s'agissait donc d'une cessation partielle de l'activité, ce qui interdisait à l'employeur d'invoquer ce motif de licenciement (Cass. soc. 23 mars 2017, n° 15-21183 FSPB). Autrement dit, en cas de cessation partielle d'activité, une fois explorées les possibilités de reclassement, l'employeur doit se tourner vers les autres motifs économiques de rupture et invoquer, selon le cas, des difficultés économiques, des mutations technologiques ou une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité.
À noter : La liste - qui expose quatre motifs économiques - n'est pas fermée. La loi précise en effet le licenciement pour motif économique peut être consécutif "notamment" à l'un de ces quatre motifs. La jurisprudence pourrait donc en accepter d'autres.
Un impact concret sur l'emploi
- Suppression d'emploi
Il y a suppression d'emploi quand que le salarié licencié n'est pas remplacé ou lorsque les tâches accomplies jusque-là par l'intéressé sont réparties entre d'autres personnes demeurées dans l'entreprise.
- Transformation d'emploi
Une transformation d'emploi peut être changement radical du contenu de l'emploi lié par exemple à l'informatisation d'un service, au recentrage des activités…
- Modification d'un élément essentiel
Une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail est par exemple le passage d'un temps complet à un temps partiel justifié par des difficultés économiques, ou une réduction des fonctions du salarié, ou encore de son salaire.
Impossibilité de reclasser
L'impossibilité de reclasser le salarié à un autre poste de l'entreprise est un préalable obligatoire à tout licenciement économique.
Attention ! Il est très important de bien apprécier si le licenciement est réellement proportionné à vos difficultés, car dans l'esprit de la loi, un licenciement économique n'est possible que s'il constitue l'ultime moyen pour permettre à votre entreprise de survivre et les juges sont très sévères envers les employeurs qui licencient pour motif économique.
Publié par Tiphaine BEAUSSERON