Loin des clichés où quelques hippies avaleraient des graines sur l'air de No Woman no Cry, ils avancent en équilibristes sur la mince frontière entre simplicité et luxe.
Chaque soir les convives se passent les plats autour d'une table unique, éclairée à la bougie. Dans les assiettes, des produits bruts mais beaux : des légumes cuits à la braise, la viande d'une ferme voisine et quelques herbes fraîchement cueillies. Sous leurs pieds, la terre dans laquelle ces dernières ont poussé, dans la serre de 800 m² éclairée par le soleil et le feu. Ces invités sont peut-être de ceux qui ont donné quelques euros au projet via la plateforme Kickstarter, ou un peu de temps pour planter, nettoyer, construire. De la naissance du restaurant à l'assiette, l'objectif est le même : rétablir le lien entre l'aliment et l'homme.
L'idée n'est pas neuve : nos habitudes alimentaires doivent changer. Mais plutôt qu'un doggy bag froid destiné à une autre poubelle ou un accord signé par tous et appliqué par peu, Stedsans propose une évolution simple, accessible et participative. La permaculture notamment, reconnue par l'Inra depuis septembre 2016, est une agriculture inspirée des systèmes écologiques naturels, visant à consommer un minimum de ressources. Ici, le plastique n'a pas sa place autour des carottes encore couvertes de terre, et les quelques pas qui les mènent du jardin à la cuisine n'émettent pas de CO2. Elles seront servies entières, de la tête au pied, travaillées sobrement pour en exalter le goût. Pour Mette et Flemming, rien d'exceptionnel : "Qualité et développement durable doivent avancer main dans la main." Ils ne sont pas les premiers, ni les derniers, à réconcilier gastronomie et écologie.
À Paris, depuis 2015, les invendus de Rungis finissent ainsi dans les marmites du Freegan Pony. Au Vert Mont de Boeschèpe, le chef locavore Florent Ladeyn se fournit exclusivement autour de son mont des Flandres. À Lyon, les équipes du Bocuse d'or ont présenté pour la première fois des assiettes entièrement végétales. Cette nouvelle gastronomie, durable et consciente, doit se mettre à la table des palaces, mais elle existe aussi loin du Michelin, juste sous les étoiles.
Publié par Lucie Moley, Bachelor Cook Design, école hôtelière d'Avignon