Christian Sinicropi a conscience de l'importance d'une équipe et il prend soin de composer la sienne lui-même. Il a choisi de transmettre son savoir et son amour de la cuisine, comme ses pairs l'ont fait avec lui. Les cinq pôles de restauration que compte le Martinez - à Cannes (06) - sont sous sa responsabilité : la Palme d'or, le Relais, la Z Plage, le room service et le banqueting. Christian Sinicropi sélectionne lui-même les candidats selon leurs C.V. Première exigence : la stabilité du candidat tout au long de son expérience professionnelle. En matière de haute gastronomie, le réseau joue souvent un rôle dans le recrutement. C'est aussi le cas au Martinez, mais Christian Sinicropi attache autant d'importance aux C.V. anonymes qu'il reçoit. Le profil et l'expérience comptent avant tout, puis la motivation affichée par le candidat. Il apprécie d'autant plus qu'un C.V. soit envoyé directement à son intention, preuve d'une candidature plus investie.
Connaître la maison, s'intéresser aux cartes des restaurants sont les premières bases pour un entretien réussi. Le candidat doit pouvoir exprimer la raison de sa présence. En fonction des profils, les possibilités d'évolution sont multiples : un jeune peut entrer à la Z Plage pour la saison et être recruté à la Palme d'or s'il a su montrer les bonnes compétences et une réelle volonté de progresser. "L'apprentissage est le point de départ d'une carrière avec la perspective possible de devenir chef, diriger une équipe et transmettre à son tour un héritage."
Technique, anticipation et mentalité positive
Sans remettre en cause le système, Christian Sinicropi trouverait pertinent que les professionnels soient plus investis dans la formation des apprentis à l'école, en dispensant des cours ou des modules obligatoires. Il trouve insuffisante la possibilité d'apprentissage en un an, mais reste ouvert : ainsi, Pierre Zani, apprenti depuis trois mois à la Palme d'or, a choisi l'option du CAP en un an. Après lui avoir conseillé une formation sur deux ans, le chef l'a admis dans son équipe. Mais il reste ferme : un dossier d'apprentissage sur deux ans permet d'acquérir les bases et de tout découvrir. Le chef observe donc avec circonspection l'évolution de Pierre Zani. Christian Sinicropi attend de son équipe qu'elle maîtrise ses fondamentaux : technique, anticipation et une mentalité positive. "Avant d'entrer dans du créatif, il est souvent nécessaire de reprendre les bases."
Pour rester longtemps aux côtés de Christian Sinicropi, il est essentiel d'être réactif. Son équipe doit rapidement comprendre ce qu'il attend d'elle et apprendre rapidement de ses erreurs. En matière de création, le chef travaille seul. Il est à l'écoute du point de vue de son équipe et des observations de chacun, mais il a le mot final sur chaque création.
La plupart des membres de l'équipe partagent un point commun : un tempérament perfectionniste, et c'est cette exigence et la capacité à se remettre en question que le chef transmet le plus. "Nous ne sommes pas là pour être gentils, mais pour être des professionnels humanistes." L'essentiel est que les membres de l'équipe partagent les mêmes valeurs. À l'image de Matthieu Molero, sous-chef des cuisines du Martinez, à ses côtés depuis huit ans. Il est plus dans l'émotionnel, plus flexible et accorde ainsi un regard différent sur le travail des jeunes apprentis. "Il faut se montrer souple et flexible ; c'est la clef pour garder les jeunes et leur permettre d'aimer le travail." Cette complémentarité entre le chef et son sous-chef crée l'équilibre de la 'tribu'.
Publié par Vanessa GUERRIER-BUISINE