“Nous venons de céder notre fonds de commerce d’hôtel incluant son personnel (deux femmes de chambre en contrat CDI depuis dix-huit et vingt-cinq ans et un homme d’entretien depuis sept ans). Comme il se doit, nous devons donc verser à l'acquéreur les sommes correspondant au décompte des congés à payer au jour de la vente.
En outre, celui-ci demande à ce que lui soit également versées entre ses mains l’indemnité ou primes de retraite calculées sur l’ancienneté du personnel au moment de la cession.
Sachant que les femmes de chambre ne prendront leur droit à la retraite que dans dix ou quinze ans, et l’homme d’entretien dans trois ans, je me demande si sa demande est vraiment recevable, d’autant plus que contrairement aux congés à payer qui sont eux bien provisionnés comptablement, il n’en est pas de même pour ces primes de retraite.
Qui plus est, entretemps, le personnel pouvant démissionner, partir à la retraite volontairement si les droits sont acquis, ou être mis en retraite par l’employeur avec - suivant les cas - des calculs de prime complètement différents.
Donc la question est, dois-je verser aujourd’hui à l’acquéreur de mon affaire ces futures primes de retraite dont-on ne connaît aucunement l’issue finale ?”
Les contrats de travail sont transférés à l’acquéreur en cas de cession de fonds de commerce. Le nouvel employeur devient donc débiteur de toutes les obligations qui incombaient à l’ancien employeur (article L1224-1 du code de travail).
Si le nouvel employeur acquitte des sommes qui étaient déjà dues lors de la cession, l’ancien employeur doit lui rembourser ces sommes, sauf s’il en avait été convenu autrement dans le contrat de cession (article L1224-2 du code du travail alinéa 2).
Il en est ainsi des congés qui doivent être réglés par l’ancien employeur au nouveau s’ils n’ont pas été soldés au moment de la cession (au prorata en fonction de la date de cession). En pratique, le jour de l’acte de cession, un chèque est fait par le cédant au cessionnaire.
En ce qui concerne l’indemnité de départ à le retraite : le salarié qui part à la retraite volontairement ou qui est mis à la retraite par son employeur a droit à une indemnité de départ, dont le calcul est différent selon l’origine du départ et selon l’ancienneté du salarié dans l’entreprise.
Lors de votre cession de fonds de commerce, aucun des trois salariés transférés n’avait apparemment présenté de notification de départ à la retraite, et vous n’aviez mis à la retraite aucun de ces salariés. Dès lors, vous n’étiez pas encore en principe débiteur de cette obligation légale d’indemnité de retraite.
Au jour de la cession du fonds de commerce, la créance d’indemnité de départ à la retraite n’était donc qu’éventuelle, et absolument pas certaine, dont le calcul n’est même pas arrêté, car même après la cession du fonds de commerce, les salariés peuvent toujours démissionner ou être licenciés, et la créance d’indemnité de départ à la retraite n’est alors pas due lors de leur départ. Il convient cependant de voir dans votre acte de cession, si une clause contient un engagement contraire de votre part.
De plus, le prix de cession convenu prend peut-être déjà en compte l’état des indemnités de départ à le retraite.
Le ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie a d’ailleurs précisé en 2005 qu’“à la date de la cession du fonds, la dette n’est donc pas certaine et ne peut donc être déduite des résultats de l’entreprise cédante. Toutefois, cette dette devrait être prise en compte dans le cadre de l’évaluation du fonds de commerce par une diminution du prix de vente dès lors qu’elle viendra obérer les bénéfices ultérieurs de l’activité cédée” (réponse du ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie à la question écrite n° 14690 de monsieur Raymond Courrière (Aude) publiée dans le JO du Sénat le 13 février 2005).
Publié par Sophie Petroussenko