Pourtant, au-delà de la simplification des mots, c'est une vision nouvelle et un nouveau projet pour le groupe hôtelier qui étaient à l'ordre du jour. C'est même un virage à 180° qui a été pris dans certains secteurs. En matière de développement, par exemple : "Nous devons abandonner le modèle économique des 40/40/20 [20 % d'hôtels en filiale, 40% en contrats de management et 40% en franchise, NDLR]. Ce modèle n'est pas cohérent car il ne prend pas en compte les opportunités qui se présentent localement. Il faut recréer un nouveau modèle : le groupe doit devenir plus performant, mais aussi plus valorisé", a-t-il indiqué.
Deux métiers : opérateur et investisseur
Ce sont donc deux métiers qui vont désormais se faire face au sein de la nouvelle organisation : le métier d'opérateur et franchiseur d'une part et le métier d'investisseur d'autre part. Ceux-ci étaient déjà existants mais mal identifiés, donc pas assez performants. Désormais, avec la création de deux pôles distincts, Accor souhaite optimiser les résultats attendus sur ces deux métiers, sachant que ceux-ci seront rattachés directement au président-directeur général, sans aucune distinction juridique mais avec un management et une équipe spécifique.
La première entité, HotelServices, représente 3 600 hôtels du groupe et 460 000 chambres sous 14 enseignes. Elle regroupe l'ensemble des hôtels en franchise, contrats de gestion, ainsi que toute l'activité des marques. Elle possède comme recettes les fees perçues par le groupe dont 50 % proviennent des hôtels non affiliés. Ce pôle, générateur de cash-flow élevé, aura pour objectif la croissance du chiffre d'affaires. Le nouveau président lui a fixé trois priorités essentielles :
- une maximisation des redevances ;
- une accélération de la politique numérique, du CRM (gestion de la relation client), de la politique de fidélisation. "Nous n'avons encore que 13 millions de membres au sein du Club Accorhotels", a-t-il déclaré, précisant qu'Accor devait se muscler pour mieux dialoguer avec les agences de réservation en ligne (OTA). "Pour le moment, nous avons budgété 80 M€ qui serviront à l'amélioration de nouveaux outils, mais ce chiffre peut évoluer", a-t-il précisé ;
- le renforcement de la stratégie par marques, "particulièrement réussie dans le très haut de gamme avec Sofitel et dans l'économique avec ibis".
À l'intérieur du pôle, afin de s'assurer de la performance des actions et acquérir plus de souplesse, le nouveau président va installer des indicateurs de performances, à l'exemple des Revpar pour la gestion des hôtels : Ebitdar (pour calculer les marges), taux de transformation, Net Promoter Score, (indicateur mesurant la satisfaction client)...
De l'asset light à l'asset right
Le deuxième pôle, HotelInvest, est une transformation de l'ancienne. division de l'immobilier et de l'investissement. Il regroupe 1 400 hôtels en propriété et location, dont 300 en pleine propriété. Ce pôle regroupe plus de 95 % d'hôtels dans les segments économique et haut de gamme, dont plus de 85 % sont situés en Europe. C'est à l'intérieur de ce pôle que les décisions du nouveau président sont les plus fortes. "Il n'y aura plus aucun hôtel en contrat de location fixe ou variable tant que l'on se sera pas donné les moyens de mettre en place les outils pour calculer la performance de ce mode de gestion", a assené Sébastien Bazin. Le nombre d'hôtels filiales au sein de ce pôle devrait augmenter, et passer de 50 % à 75 %, "sur l'économique ou le moyenne gamme". Pas question d'investir dans du Sofitel par exemple.
Les objectifs de ce pôle ont été également clairement identifiés. Il s'agit de privilégier la génération de cash-flow, de réduire la volatilité des résultats, d'optimiser la stratégie de Capex (travaux de modernisation dans les hôtels).
Fini donc l'asset light : la nouvelle stratégie renoue avec l'asset right qu'avait déployée Gilles Pélisson en son temps. Enfin, comme HotelServices, HotelInvest disposera d'outils de performances de type rotation de portefeuille, Capex, Net Operating Income, Roce, et ratios de dette.
Une gouvernance plus simple
Enfin, la nouvelle gouvernance décidée par Sébastien Bazin se veut plus simple, plus claire et mieux organisée. "L'ancien organigramme était d'une trop grande complexité. Le Comex [comité exécutif] sera réduit à 10 personnes et j'aurai à mes côtés Sven Boinet, nommé directeur général délégué, a détaillé le p.-d.g. Parmi les membres, Sophie Stabile, directrice financière, reste la seule rescapée du précédent Comex, et des "patrons de zones géographiques", dont Christophe Alaux, pour la France.
Pour Sven Boinet, ancien directeur général d'Accor qui revient aux manettes après quelques années, il est clair que l'organisation méritait d'être simplifiée : "Nous avions besoin d'une organisation claire et simple, pour être plus efficace. J'ai récemment rencontré des équipes qui m'ont paru peu motivées parce qu'elles étaient perdues dans des processus de décision compliqués", précise-t-il, réjoui du nouvel organigramme.
Pour Sébastien Bazin, Accor doit revenir sur ses valeurs fondamentales : "Redevenir maître de son destin, retrouver l'envie d'innover, et l'envie tout court. Ce métier est un métier de croissance, qui créée de la valeur. Je vous demande de partager ce projet avec moi."
Ses déclarations se voulaient également rassurantes pour les investisseurs et les actionnaires, pour qui le discours de valorisation des actifs est important, pour les équipes qui peuvent se retrouver dans un nouveau projet porté avec passion, et enfin pour les franchisés qui, actuellement en congrès au Portugal, n'ont pas encore fait connaître leur position face à ce projet.
Publié par X. S.