"Nous avons décidé de relever la TVA de 5,5 % à 7 % sur tous les produits et services à l'exception des produits de première nécessité, et notamment l'alimentation. C'est un taux intermédiaire aligné sur le taux allemand de la TVA à taux réduit", a annoncé le Premier ministre François Fillon lors de la conférence de presse qu'il a tenue, lundi 7 novembre, à l'hôtel de Matignon pour présenter le plan d'austérité destiné à compenser la baisse à 1 % des prévisions de croissance (au lieu des 1,75 % prévus) et maintenir les objectifs en matière de baisse des déficits. Le Premier ministre a justifié ce nouveau plan de rigueur "par les risques que font peser les déficits et l'endettement de l'État sur l'avenir. Le mot 'faillite' n'est pas abstrait. Notre souveraineté économique, financière et sociale exige des efforts collectifs et prolongés et même quelques sacrifices".
Après la présentation du plan de rigueur, un journaliste italien a demandé à François Fillon si la revalorisation à 7 % du taux de TVA pour la restauration ne démontrait pas que l'application du taux réduit pour ce secteur avait été une mauvaise idée. La réponse de ce dernier fut sans appel "Je m'inscris en faux contre cette déclaration qui relève plus d'une affirmation que d'une question. Et je tiens à rappeler que la restauration était soumise au taux normal de 19,6 %, avant de bénéficier du taux réduit de TVA à 5,5 %, taux réduit qui va passer à 7 %. Ce qui répond au soucis de la convergence des taux en Europe."
Seuls l'alimentation, l'énergie et les produits et services destinés aux personnes handicapées pourront continuer à bénéficier du taux réduit de 5,5 %. Toutes les formes de restauration sont donc concernées par ce nouveau taux de 7 % : traditionnelle, rapide, collective, ainsi que toutes les formes de commerces proposant des préparations alimentaires. Ce qui veut dire que le sandwich vendu dans un restaurant traditionnel ou rapide, dans un café, une boulangerie ou en grande surface sera soumis au même taux de TVA de 7 %.
1,8 milliard d'euros supplémentaire
L'hôtellerie dans son ensemble va, elle aussi, être soumise à ce taux intermédiaire, c'est-à-dire non seulement les hôtels mais aussi les autres formes d'hébergement comme les chambres d'hôte, les résidences de tourisme… Avec le relèvement du taux réduit à 7 %, le Gouvernement table sur une rentrée de recettes supplémentaire de l'ordre de 1,8 milliard d'euros.
Cette mesure sera intégrée dans les textes d'ici la fin de l'année, a précisé François Fillon. Ce qui permettrait une application du taux réduit à compter du 1er janvier 2012.
Réactions des professionnels
Pour Roland Héguy président de l'Umih, "Cette volte-face est un véritable contre-sens économique qui rend caduc le contrat d'avenir". L'organisation professionnelle déplore que ce soit "une fois encore les entreprises de services de notre secteur qui supportent l'essentiel de ce plan de rigueur." L'Umih précise demeurer mobilisée et vigilante quant à la mise en oeuvre législative de ces mesures - à l'instar des syndicats qui lui sont proches : Groupement national des chaînes (GNC), Syndicat national de la restauration publique organisée (SNRPO) et Confédération des professionnels des indépendants de l'hôtellerie (CPIH). Gérard Guy, président de la CPIH, déplore une mesure qui va bloquer la croissance au lieu de la relancer, car cette revalorisation du taux de TVA, au final, va être payée par le client. Il attend de voir le détail de cette mesure qui doit s'appliquer à tous.
Pour Didier Chenet, président du Synhorcat, le plus important est que le secteur de l'hôtellerie-restauration reste soumis au taux réduit de TVA, qu'on ne touche pas à l'équité fiscale, ce qui sera le cas puisque tous les types de restauration seront soumises à ce taux. Mais surtout, il demande que soit supprimée dans la loi de finance pour 2012, la taxe de 2 % pour les nuitées supérieures à 200 € dans l'hôtellerie, qu'il considère comme étant une double peine pour ce secteur d'activité.
La Fagiht, consciente que la profession doit contribuer à l'effort demandé, à l'instar de tous les secteurs d'activité, se délcare satisfaite de l'application de ce taux intermédiaire à l'ensemble des types d'hébergement, ce qui permet d'éviter toute distorsion de concurrence. Pour l'instant, la Fagiht estime qu'il est prématuré de remettre en question le contrat d'avenir et ses accords sociaux.
"C'est une très mauvaise nouvelle pour la restauration rapide qui était au taux de 5,5 % depuis de nombreuses années et dont le modèle économique s'est construit sur cette base", précise Hubert Vilmer président du Syndicat national de l'alimentation et de la restauration rapide (Snarr). Seul élément positif, pour ce dernier, "quel que soit le canal de distribution, tous seront (désormais) soumis au même taux". Reste une incertitude, selon Hubert Vilmer : la liste des produits de première nécessité qui continueront à bénéficier du taux réduit à 5,5 %, et qui pourraient donc modifier les règles d'une saine concurrence.
Suite aux déclarations de certaines organisations patronales du secteur de l'hôtellerie-restauration quant à la remise en cause du contrat d'avenir, la réaction des syndicats de salariés du secteur ne s'est pas fait attendre. La CFDT se déclare très inquiète "de la réaction du patronat lors de la prochaine négociation nationale de la branche HCR qui aura lieu le 29 novembre" et précise qu'il "serait particulièrement injuste de faire des salariés des boucs-émissaires en gelant les salaires et en supprimant la prime TVA dans les hôtels, cafés restaurants."
Pour sa part, la fédération CGT du commerce et des services exige le maintien de l'ensemble des acquis pour les salariés du secteur HCR à savoir la prime TVA, les jours fériés et la mutuelle frais de santé obligatoire. La CGT conclut : "Ce n'est pas en réduisant le pouvoir d'achat des 800 000 salariés qui travaillent dans l'hôtellerie-restauration qu'on relancera la croissance."
Publié par Pascale CARBILLET