Lorsqu'il existe un litige entre un employeur et son salarié, l'une ou l'autre des parties peut saisir la justice. Mais, c'est parfois sans bien mesurer toutes les facettes de la procédure enclenchée ni les délais associés.
Pour porter votre cas en justice, vous devez saisir la bonne section du Conseil de Prud'hommes (CPH) géographiquement compétent. Dans les CHR, il s'agit de la section commerce ou de la section encadrement pour les salariés cadres. Vous pouvez trouver les coordonnées du Conseil de Prud'hommes géographiquement compétent sur le site www.annuaires.justice.gouv.fr.
En principe, le CPH saisi doit être :
- celui du lieu d'exécution du travail ;
- ou celui du lieu où le contrat de travail a été signé ;
- ou encore du lieu où l'employeur est établi, c'est-à-dire le siège social de l'entreprise (art. R1412-1 du code du travail).
Il peut ainsi arriver que plusieurs CPH soient compétents. Dans ce cas, vous êtes libre de choisir celui qui vous convient, sachant que les délais de procédure peuvent varier d'un tribunal à l'autre, que certains ont une réputation 'pro salarié' ou 'pro employeur'. En pratique les conseils d'un avocat spécialiste ou d'un conseiller syndical pourront vous guider dans votre choix.
Comment s'effectue la saisine
Elle s'effectue par lettre recommandée avec accusé de réception mentionnant les noms et coordonnées du demandeur, du défendeur, et le détail des demandes formulées (pour un modèle de lettre, cliquez ici). Pensez à conserver une copie de votre lettre ainsi que de l'accusé de réception. La saisine peut aussi se faire sur place en remplissant un formulaire spécifique délivré par le greffe. Depuis le 1er janvier 2014, la saisine du CPH est redevenue gratuite (loi 2013-1278 du 29 décembre 2013, art. 128-I, JO du 30).
Passage obligatoire devant le bureau de conciliation
Une fois la saisine enregistrée par le greffe, celui-ci adresse aux parties une convocation pour une audience devant le bureau de conciliation, qui sera composé de deux conseillers prud'homaux. Cette étape est obligatoire sauf dans certains cas limitativement énumérés par la loi (voir encadré ci-dessous). Lors de cette audience privée, les parties, éventuellement représentées par leur avocat ou représentant syndical (mais ce n'est pas obligatoire), vont exposer leurs demandes et expliquer brièvement leur position. Cette audience a uniquement pour but de voir si une solution amiable est envisageable. Si les parties trouvent un terrain d'entente, cet accord est formalisé par un procès-verbal de conciliation, ce qui met fin à la procédure. Le procès-verbal de conciliation est assimilé à une transaction et doit donc donner lieu à des concessions réciproques. Ainsi, si le salarié renonce à poursuivre son action en justice, l'employeur ne peut pas se borner à accorder au salarié ce à quoi il avait droit. Il doit aller au-delà.
Bureau de jugement en cas d'échec de la conciliation
Lorsqu'aucune conciliation n'est possible, le bureau de conciliation rédige un procès-verbal de non-conciliation et convoque les parties devant le bureau de jugement pour plaider leur dossier oralement et publiquement. Sur le bulletin de renvoi en bureau de jugement, des délais sont fixés pour que les parties se communiquent leurs pièces et conclusions (article R1454-18).
Renvoi possible
Bien que la procédure soit orale, il est nécessaire de respecter le principe du contradictoire, c'est-à-dire que la partie adverse doit connaître à l'avance les arguments que vous exposerez lors de l'audience. Ainsi, en pratique, les parties s'échangent des conclusions écrites et des pièces les justifiant. La préparation d'un dossier pouvant nécessiter du temps, il est relativement courant qu'une partie communique ses pièces et conclusions avec retard et que la première audience soit repoussée à la demande de la partie adverse qui souhaite disposer de davantage de temps pour y répondre. On dit qu'elle demande un 'renvoi', c'est-à-dire le report de la plaidoirie à une date ultérieure. Dans ce cas, soit les parties se mettent d'accord sur le principe d'un renvoi, soit elles ne le sont pas et c'est au juge qu'il reviendra de statuer. Les délais de renvoi sont très variables d'un CPH à l'autre. Il peut s'agir de quelques mois à 18 mois environ. Il est donc important de respecter les délais afin d'éviter toute perte de temps.
Plaidoirie
Le jour de l'audience, le dossier est plaidé, c'est-à-dire entendu par quatre conseillers prud'homaux : deux représentants l'employeur et deux représentants le salarié. À l'issue de l'audience, le CPH précise la date à laquelle le jugement ('le délibéré') sera rendu.
Il est possible, mais rare, que le délibéré soit rendu sur le siège, c'est-à-dire immédiatement, permettant ainsi d'être connu dès le soir même ou le lendemain matin. Le plus souvent, il faut attendre un ou deux mois après l'audience. Pour obtenir une copie du jugement, vous pouvez vous rendre à l'audience de délibéré à la date donnée par le CPH, ou attendre de le recevoir par la poste, les jugements étant notifiés aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception, en général quelques jours après avoir été rendus. En principe, une copie est adressée aux avocats mais cela dépend des CPH. C'est à compter de la notification du jugement que les délais de recours commencent à courir.
Publié par Tiphaine Beausseron et Alix Floret-Lemaire, avocate chez Vaughan Avocats.