Les incertitudes liées au Covid ou à l’augmentation du tarif de l’énergie et des matières premières, les difficultés de recrutement, la clientèle pas toujours au rendez-vous… sont autant de problématiques qui poussent certains hôteliers à adhérer à une chaîne. L’idée étant de se sentir moins seul face aux difficultés et de profiter de conseils et d’outils, pour une meilleure gestion et, à terme, un chiffre d’affaires à la hausse. Chaîne intégrée ou volontaire ? Il existe des avantages et des inconvénients dans les deux scénarios. Voici quelques pistes pour se faire une idée plus précise sur ce qu’est une chaîne hôtelière, à travers les exemples des enseignes Relais & Châteaux, B&B Hotels, Logis Hôtels et ibis Styles.
Les critères de sélection
► Relais & Châteaux : un inspecteur de l’enseigne est dépêché au sein de l’établissement demandeur (moins de 50 chambres), avec une grille de 500 points de contrôle à valider. “On visite de la porte à la porte. Et ce, que l’on soit dans un hôtel à Paris, une hacienda en Argentine ou un château en Irlande”, souligne Laurent Gardinier, président de Relais & Châteaux. Ensuite, le rapport est examiné en commission, puis envoyé au conseil d’administration, “le seul à pouvoir voter l’adhésion”.
► B&B Hotels : pour faire partie de B&B, deux cas de figure sont possibles. Soit l’hôtel (70 chambres en moyenne) existe déjà, auquel cas “on va apporter du conseil, par exemple pour améliorer la qualité du sommeil avec la mise en place d’une meilleur isolation acoustique”, explique Arnaud Lemonnier, directeur développement franchise de B&B Hotels; soit l’hôtel est une nouvelle construction. Le processus pour devenir un établissement B&B est alors plus long : “Entre le premier contact terrain et l’ouverture, il faut compter environ trois ans.” Dans les deux cas, « l’humain est primordial : le courant doit passer entre l’hôtelier et nous ».
► Logis Hôtels : “Pour intégrer Logis Hôtels, il faut avant tout avoir envie de travailler avec nous.” C’est une condition sine qua non pour Karim Soleilhavoup, directeur général de Logis Hôtels. “Nous devons partager une même vision quant à la convivialité, la proximité, l’impact sur le territoire”, poursuit-il. Sans oublier “l’envie aussi de travailler avec d’autres hôteliers du groupe, en synergie, en cohérence”. Sachant que, désormais, avec ses six marques, Logis Hôtels compte 2 300 établissements à travers l’Europe, de 35 chambres en moyenne.
► ibis Styles : cette enseigne est considérée “comme une marque de ‘conversion’ au sein de la famille ibis”, précise Philippe Bijaoui, directeur du développement pour l’Europe et l’Afrique du Nord au sein du groupe Accor. Autrement dit, “elle est relativement facile à mettre en place pour un propriétaire, car chaque hôtel est unique, apportant ainsi une certaine flexibilité”. L’établissement - 3 étoiles dans la majorité des cas – peut disposer d’un bar ou d’un restaurant - sans obligation - et sa “conversion” nécessite l’intervention d’un designer qui interprète un thème choisi par l’hôtel. L’idée : “Se différencier et rester dans la mémoire du client.” À cela s’ajoutent des standards de qualité communs aux marques ibis, à l’instar du lit Sweet Bed by ibis ou du petit déjeuner buffet inclus dans le prix de la chambre.
Combien ça coûte ?
► Relais & Châteaux : de 25 000 à 30 000 € par an, selon le nombre de chambres.
► B&B Hotels : au droit d’entrée de 600 € par chambre, s’ajoutent des honoraires techniques d’accompagnement (30 000 € par an pour un hôtel de moins de 100 chambres) et une redevance annuelle de 8 % du chiffre d’affaires annuel HT.
► Logis Hôtels : montant de la cotisation comprenant l’outil de distribution et l’avis clients complet : 5 220 € HT pour 20 chambres, 6 200 € HT pour 25 chambres et 7 100 € HT pour 30 chambres.
► ibis Styles : le groupe Accor ne communique pas sur ce point.
Les services et outils proposés
► Relais & Châteaux : “Nous proposons une palette d’une soixantaine de services et chaque membre choisit les outils dont il a besoin. Ainsi, certains membres n’utilisent que le label Relais & Châteaux, quand d’autres recourent au système de réservation, aux services commerciaux, aux ressources humaines - avec plateforme de CV - ou encore à nos fournisseurs pour les amenities”, détaille Laurent Gardinier. En outre, chaque membre a accès à un référent dédié.
► B&B Hotels : chaque membre est formé - le temps d’un cycle de 3 à 5 jours - à l’utilisation d’un système de gestion des établissements (PMS), aux procédures internes et autres outils propres à l'enseigne. À cela s’ajoute l’accès au service juridique du groupe hôtelier.
► Logis Hôtels : “Nous proposons l’accès à une plateforme de services liés à la commercialisation, au recrutement - en quelques clics, on peut diffuser une annonce sur trois sites en même temps - ou encore à la formation (management, RSE, RGPD…), grâce à notre académie”, détaille Karim Soleilhavoup.
► ibis Styles : “Rejoindre le groupe Accor, c’est avoir accès à la plateforme et au programme de fidélité ALL - Accor Live Limitless et à son réseau de membres à travers le monde. C’est aussi bénéficier de tout le soutien du groupe, notamment en termes de formation”, explique Philippe Bijaoui.
Avantages et les inconvénients
► Relais & Châteaux :
les + “Adhérer aux Relais & Châteaux, c’est faire grimper de 20 à 40 % son nombre de réservations”, indique Laurent Gardinier. Autre avantage : l’accès au congrès annuel des Relais & Châteaux : idéal pour réseauter, sachant que la chaîne représente à elle seule 1 350 étoiles Michelin à travers le monde.
les - Peu d’élus chaque année pour intégrer la chaîne. En 2023, ils n’étaient qu'une vingtaine de nouveaux membres, dont un seul français : la compagnie de croisières Le Ponant.
► B&B Hotels :
les + Avec 750 hôtels dans le monde et 3 000 attendus d’ici à 2030, le groupe B&B Hotels est en plein développement.
les - Les hôtels dont les chambres sont jugées trop petites, dont les matériaux utilisés ne permettent pas une bonne isolation acoustique ou encore ceux dotés de coursives sont, dans la majorité des cas, retoqués par l'enseigne.
► Logis Hôtels :
les + “Un accompagnement stratégique au quotidien”, souligne Karim Soleilhavoup. Mais aussi l’accès à une centrale d’achats où l’on incite à consommer local (“85 % des achats au sein du groupe sont réalisés à moins de 215 km de distance”), des tarifs négociés pour le gaz et l’électricité, sans oublier tous les avantages d’un comité d’entreprise. “Quant à la commercialisation, notre différence, c’est de développer de la valeur au sein des hôtels, dont de la vente directe”, ajoute le directeur général de Logis Hôtels.
les - “Tout ce qui est performant coûte cher. Ne regardez pas combien ça coûte, mais combien ça rapporte d’intégrer Logis Hôtel”, explique Karim Soleilhavoup. L’hôtelier doit donc accepter de faire confiance, certes avec preuves à l’appui, mais en ces temps incertains, un tel discours n’est pas évident à appréhender.
► ibis Styles :
les + Rejoindre la marque ibis Styles - plus de 640 hôtels dans le monde et près de 250 en France -, c’est d’abord rejoindre le groupe Accor, fort de 44 marques et plus de 5 000 hôtels dans le monde. C’est aussi avoir accès à des formations - à court ou moyen terme - via l’Academy Accor, qui couvre toute l’expertise du métier d’hôtelier, accompagnement à l’ouverture compris.
les - Chaque ibis Styles est différent des autres et permet à chaque propriétaire d’exprimer sa propre créativité. Revers de la médaille : il faut donc trouver le bon thème, le bon fil conducteur, pour se sentir bien dans son hôtel, mais aussi réussir à attirer et fidéliser, la clientèle comme les équipes.
Est-ce compliqué de quitter une enseigne ?
Il faut distinguer le cas de la chaîne volontaire et celui de la franchise. Dans le premier cas, les hôteliers peuvent quitter le réseau assez facilement : un courrier recommandé peut parfois suffire. En revanche, la franchise est régie par la loi Doubin, qui stipule qu’il n’est pas possible de rompre le contrat avant son terme. Sauf pour motif grave touchant à la marque, à la délivrance de l’assistance ou à la transmission du savoir-faire.
► Relais & Châteaux : on recense une vingtaine de sortants par an, qui ne répondent plus aux critères Relais & Châteaux.
► B&B Hôtels : sur les 380 hôtels que le groupe compte en France, dont 80 en franchise, “six seulement ont été perdus en trente ans, suite à une fin de contrat de franchise ou une mésentente”, indique Arnaud Lemonnier.
► Logis Hôtels : à l’issue d’une période initiale de trois ans, les contrats sont ensuite renouvelables tous les ans. Les départs des hôteliers s’expliquent soit par une fin d’activité, l’envie de rejoindre une franchise ou de s’affranchir de l’enseigne.
► ibis Styles : “Nous ouvrons environ 15 ibis Styles par an en France. C’est une marque dynamique puisque nous avons 19 hôtels dans le pipeline, le plus fort en France parmi les marques Accor. En moyenne, seulement deux ou trois établissements perdent la marque chaque année et cela est essentiellement lié à des besoins de rénovations lourdes, dont les coûts ne sont pas viables pour l’hôtel”, détaille Philippe Bijaoui.
Publié par Anne EVEILLARD